- 1°/Que faut-il pour libérer l’ONU du joug de la politique de puissance? par Hans-Christof von Sponeck – Allemagne*
- 2°/La paix dans le Caucase du Sud… prochaine victime de la géopolitique occidentale? par Ralph Bosshard
- 3°/Dans le chaos de l’économie du gaz… les gens sont doublement trompés par le Professeur Eberhard Hamer – Mittelstandsinstitut Niedersachsen e. V.
1°/Que faut-il pour libérer l’ONU du joug de la politique de puissance? par Hans-Christof von Sponeck, Allemagne*
Il y a beaucoup à dire sur la libération de l’ONU du joug de son oppression géopolitique. Il s’agit d’une libération. Mais tout d’abord, quelques brèves indications sur l’origine du joug en question. |
Parmi ces origines figure la rencontre historique de février 1945 entre Staline, Roosevelt et Churchill à Yalta, en Crimée. En préparation de la création des Nations unies pour succéder à la Société des Nations qui avait échoué, trois vieux hommes – un communiste et deux capitalistes – voulaient créer une institution qui garantirait la paix et le bien-être mondial. Ils se sont mis d’accord sur le fait que leurs intérêts individuels devaient être garantis par le droit de veto au Conseil de sécurité. Ainsi, l’on dépend les uns des autres pour exprimer le pouvoir individuel. Il s’agissait d’un accord faustien, d’une conspiration machiavélique! C’était probablement la partie la plus importante du joug naissant de l’ONU
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Une volonté de leadership occidental à l’ONU
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Cela ne pouvait pas bien se passer! Cela signifiait un choc d’idéologies et d’intérêts nationaux propres, considérablement aggravé par l’éveil du monde des colonies. Deux ans seulement après la création de l’ONU, les réalités terrifiantes de la guerre froide, qui accompagne encore notre monde aujourd’hui, sont apparues.
Au cours de la guerre froide, l’Occident était politiquement beaucoup plus puissant, économiquement et financièrement beaucoup plus potent et parfaitement préparé à revendiquer le leadership de la nouvelle organisation
Aujourd’hui encore, l’ensemble du système de l’ONU est solidement ancré à l’Ouest:
- Le siège politique de l’ONU se trouve à New York;
- Les unités de l’ONU comme la Banque mondiale et le Fonds monétaire international ont leurs bureaux à Washington;
- la Cour internationale de justice se trouve à La Haye;
- les agences spécialisées sont principalement situées en Europe occidentale et en Amérique du Nord;
- trois des membres permanents du Conseil de sécurité sont des pays occidentaux.
Conclusion: le rêve du possible de l’ONU est resté pendant plus de 77 ans le cauchemar de l’impossible! Le joug de la politique de puissance occidentale a largement privé l’ONU de la liberté d’action que la Charte de l’ONU lui a attribuée et dont elle a besoin pour remplir sa mission de progrès humain mondial.
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Le joug de la politique de puissance
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Examinons cette emprise d’un peu plus près et essayons ensuite de répondre à la question suivante: que faut-il pour libérer l’ONU du joug de la politique de puissance occidentale et que cela implique-t-il?
Tout d’abord, le monde du 21e siècle est aujourd’hui plus divisé que jamais. La responsabilité principale en incombe aux puissances mondiales, en particulier aux Etats-Unis et à l’unilatéralisme qu’ils ont imposé, mais aussi, bien sûr, aux quatre autres membres du Conseil de sécurité.
Les cinq puissances du Conseil de sécurité (P5) ont peur de la majorité des nations de l’Assemblée générale qui ne veulent plus accepter «l’emprise des cinq».
Mais cette peur explique l’emprise en question:
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Le comportement du P5 a empêché le désarmement de manière générale ainsi que le désarmement nucléaire, tous deux depuis longtemps exigés par la grande majorité de l’Assemblée générale.
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Comme l’a montré le cycle de négociations commerciales de Doha de la CNUCED, la création d’un nouvel ordre économique mondial plus équitable, appelé New International Economic Order (NIEO), a toujours été bloquée par les membres permanents et d’autres pays de l’OCDE.
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La décolonisation reste un thème important de l’ONU, car l’indépendance n’est pas accordée aux territoires d’Asie, d’Amérique latine, du Pacifique et d’Afrique par les propriétaires des colonies.
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Les puissances mondiales telles que la Chine et les Etats-Unis font partie des plus grands pollueurs, mais n’ont que lentement et timidement promis leur soutien à la lutte contre le réchauffement climatique à Paris, Copenhague et Glasgow (2021).
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La coopération entre l’ONU (Assemblée générale et Conseil de sécurité) et la société civile et les ONG, malgré quelques avancées ces dernières années, n’a progressé que lentement. Des pays puissants, pas seulement les pays du P5, mais aussi des pays comme l’Inde et le Brésil, ont freiné une telle coopération, de peur que la souveraineté des gouvernements ne soit limitée.
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Jusqu’à présent, le droit international ne s’est principalement appliqué qu’aux faibles. Les puissants de ce monde jouissent d’une claire impunité pour leurs actes contraires au droit international. L’Irak, la Yougoslavie, l’Afghanistan, la Syrie, la Libye et l’Ukraine ne sont que quelques exemples, mais des exemples graves. La Cour internationale de justice de l’ONU peut émettre des jugements, mais n’en découle aucune obligation de les respecter. Elle est ainsi restée impuissante. Le fait que la Cour pénale internationale (qui n’est pas une institution de l’ONU) soit restée en grande partie un tribunal pour l’Afrique est accablant.
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Le joug de la dépendance financière du système de l’ONU vis-à-vis des pays donateurs s’est alourdi au fil des années, alors que les contributions obligatoires restent faibles – et c’est embarrassant. Le budget du secrétaire général de l’organisation en question est inférieur à celui du chef de la police de New York! En comparaison avec les contributions par habitant des Etats-Unis et de l’Allemagne, le petit royaume du Bhoutan paie une contribution plus élevée. A cela s’ajoute une politisation croissante des contributions volontaires: les pays donateurs imposent leurs conditions sur la manière dont leurs contributions doivent être utilisées. Le système de l’ONU est ainsi privé de la liberté de mettre en œuvre ses propres priorités.
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Les tentatives des Etats membres de supprimer le service permanent des affaires étrangères de l’ONU, ont certes échoué jusqu’à présent, mais ont établi un climat d’incertitude parmi le personnel de l’ONU et ceux qui s’intéressent à une carrière dans ce domaine. Pourtant, chaque Etat a son Ministère des affaires étrangères.
Ces huit exemples sont des indices de la force du joug existant sur l’ONU. Celui-ci a considérablement compliqué le travail des Nations unies jusqu’à présent.
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Se libérer du joug
de la politique de puissance
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Il serait naïf de penser que la reconnaissance des obstacles normatifs, structurels et de fond dans le système de l’ONU ainsi que la demande de réformes par la majorité des Etats membres de l’ONU suffisent à libérer l’ONU du joug de cette oppression.
Comme nous l’avons dit, les tentatives de réforme ont toujours existé. Elles ont toutes été infructueuses et le resteront tant que – et c’est décisif pour l’avenir de l’ONU – les grandes puissances ne sont pas prêtes à reconnaître que le monde du 21e siècle n’est pas resté celui de 1945. Elles devraient aussi accepter le passage d’une non-communauté à une véritable communauté internationale, telle qu’elle est mentionnée dans le préambule de la Charte. Cela ne sera pas possible sans que les pays du P5 passent du droit de la force à la force du droit!
Cela implique de remplacer l’égoïsme géopolitique, l’unilatéralisme et l’impunité par une volonté de compromis et de convergence et par l’obligation de rendre des comptes pour tous.
La carte des conflits et des crises dans le monde d’aujourd’hui montre clairement que le temps d’un changement fondamental de mentalité et de la libération de l’ONU de son joug n’est pas encore possible. Mais ce temps viendra. Sans changement de mentalité, le monde n’a pas d’avenir.
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«Dans notre for intérieur résident d’avantage
de forces que nous ne pensons!»
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En tant que citoyens réfléchis, nous devons nous sentir obligés, surtout en ces jours de nouvelle guerre en Europe, de renforcer encore notre engagement pour un monde pacifique avec le courage de la conviction.
Il s’agit de garder les pieds sur terre, mais aussi de toujours regarder vers les étoiles. Dans notre for intérieur résident d’avantage de forces que nous ne pensons!•
(Traduction Horizons et débats)
*Exposé lors de la conférence annuelle de la groupe de travail «Mut zur Ethik» («Europe – vers quel avenir?») du 2 au 4 septembre 2022.
Hans-Christof von Sponeck a travaillé 32 ans à l’ONU. Durant cette période, il a notamment travaillé à New York, au Ghana, au Pakistan, au Botswana, en Inde et a été directeur du bureau européen du programme de développement du PNUD à Genève. De 1998 à 2000, il a été coordinateur de l’ONU et secrétaire général adjoint de l’ONU, responsable du programme humanitaire «pétrole contre nourriture» en Irak. En février 2000, il a démissionné pour protester contre la politique de sanctions contre l’Irak. Hans-Christof von Sponeck a été récompensé à plusieurs reprises, notamment par le Coventry Peace Prize de l’Eglise d’Angleterre, le Peacemaker Award de Washington Physicians for Social Responsibility et le Bremer Friedenspreis. Il travaille actuellement avec Richard Falk à la rédaction d’un livre sur la réforme de l’ONU qui sera publié en 2022. |
2°/La paix dans le Caucase du Sud… prochaine victime de la géopolitique occidentale? par Ralph Bosshard
Ces derniers jours, des nouvelles ont circulé selon lesquelles un accord de paix pourrait être en vue dans le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, qui mettrait fin non seulement au conflit vieux de plusieurs décennies, sur le Haut-Karabakh, mais aussi au vieux conflit entre les deux Etats du Caucase du Sud.1 Toutefois, cet accord n’est pas encore consolidé: la guerre en Ukraine et des considérations géopolitiques pourraient encore faire échouer le projet.
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Le 9 novembre 2020, un accord de cessez-le-feu est entré en vigueur sur médiation de la Russie, mettant provisoirement un terme à six semaines de guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. La pierre d’achoppement des négociations de paix a ensuite été le «corridor Zangezur», qui doit relier l’Azerbaïdjan à l’enclave de Nakhichevan, située à l’ouest de l’Arménie.
L’Azerbaïdjan a toujours eu coutume d’utiliser des moyens militaires pour exercer une pression politique. A cette fin, Bakou n’a pas hésité ces derniers mois à prendre le territoire arménien pour cible et à occuper des parties de terrain dont l’appartenance à l’Arménie ne fait aucun doute. Mais jusqu’à présent, hormis des paroles, l’Occident n’avait pas grand-chose à offrir aux Arméniens.2
Une histoire mouvementée
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Au cours de l’histoire mouvementée de l’Arménie, la région historique du Zangezur faisait partie de la région de Syunik, qui était considérablement plus grande que l’actuelle province du même nom dans le sud de l’Arménie.
Après la révolution d’octobre de 1917, les républiques d’Arménie et d’Azerbaïdjan devenues indépendantes se sont disputées l’appartenance de certaines régions à population mixte, dont le Zangezur. Après de violents conflits arméno-azerbaïdjanais, la majeure partie de la région a été attribuée en 1924 à la RSS d’Arménie, qui avait entre-temps intégré l’Union soviétique. Par la suite, les Azerbaïdjanais de souche ont émigré de cette région.3 Les discussions autour du Zangezur suscitent désormais des craintes que l’Azerbaïdjan puisse également revendiquer ces territoires-là.
L’accord de cessez-le-feu du 9 novembre 2020 contient, outre des dispositions à caractère militaire relatives à l’arrêt des hostilités, des dispositions visant à régler les différends politiques. Il y est question notamment de la levée de tous les barrages routiers dans la région.4 Cela équivaudrait à un grand pas en avant, car les frontières entre l’Arménie et respectivement la Turquie et l’Azerbaïdjan étaient hermétiquement fermées depuis la fin de la guerre en 1994, et même pas ouvertes aux diplomates et aux observateurs de l’OSCE chargés de contrôler le cessez-le-feu.
Un accord sur la fin du blocus entre la Turquie et l’Arménie avait été négocié le 10 octobre 2009 à Zurich, mais n’a jamais été mis en œuvre.5
L’accord de cessez-le-feu prévoit notamment la levée de tous les blocus, mais sa mise en pratique concrète divise les esprits: l’Arménie a proposé la réouverture de postes-frontières avec l’Azerbaïdjan à Karahunj et Sotk, ainsi qu’un poste-frontière avec la province azerbaïdjanaise de Nakhichevan à Yeraskh.
Surtout le poste de Karahunj serait important à plusieurs égards, car il ouvrirait non seulement la route de Goris en Arménie vers Qubadli en Azerbaïdjan, mais faciliterait également le transit routier vers le Syunik arménien, qui longe sur de nombreux kilomètres la frontière arméno-azerbaïdjanaise. L’utilisation de cette route avait déjà fait l’objet de litiges l’année dernière, lorsque les autorités azerbaïdjanaises avaient soudain exigé des droits de douane de la part des transporteurs iraniens.
L’Azerbaïdjan, quant à lui, insiste sur l’ouverture de la liaison routière et ferroviaire le long de la rivière Arax, qui constitue la frontière entre l’Iran et l’Arménie. Mais Bakou veut plus que cela: elle souhaite que sur cette route des transports soient possibles sans contrôle arménien.6 Dans l’accord de cessez-le-feu de novembre 2020, il avait été convenu que les voies de communication entre l’Azerbaïdjan et Nakhichevan seraient sous le contrôle des troupes frontalières russes.7
L’appellation même de «corridor de Zangezur» suscite la méfiance en Arménie, car la comparaison avec le corridor de Laçin (Berdzor en arménien) n’est pas loin. Celui-ci relie le Haut-Karabakh à l’Arménie et représente une portion de territoire initialement azerbaïdjanais qui est restée sous le contrôle de la République d’Artsakh lors du cessez-le-feu de novembre 2020.8 Erevan craint de perde le contrôle de la région frontalière si la partie azerbaïdjanaise envisage une solution similaire pour la région du fleuve Arax. Le principal point de passage entre Agarak en Arménie et Nurduz en Iran serait alors sous le contrôle de l’Azerbaïdjan, et cela fait renaître l’ancienne crainte qu’au lieu de vouloir ouvrir des voies de communication dans la région, l’Azerbaïdjan et la Turquie ne cherchent à isoler totalement l’Arménie.9 Dans l’accord de cessez-le-feu il n’a jamais été question d’une cession de territoire arménien à l’Azerbaïdjan, et une telle cession à la frontière entre l’Arménie et l’Iran serait exactement le contraire de ce qui était prévu.
Du point de vue arménien, il s’agit de l’existence ou non de l’Etat arménien et de sa population, y compris celle du Haut-Karabakh. Les récentes annonces concernant les cours de l’OTAN en Azerbaïdjan et les exercices conjoints des armées azerbaïdjanaise, turque et géorgienne renforcent les craintes des Arméniens d’être coincés entre l’ennemi juré et Etat de l’OTAN qu’est la Turquie, une Géorgie de plus en plus hostile, et un Azerbaïdjan qui peut tout se permettre grâce à son importance en tant que fournisseur de gaz naturel pour l’Europe.10 Parallèlement, l’Arménie risque d’être isolée de l’Iran, avec lequel elle entretenait jusqu’ici de bonnes relations, et de son allié russe.
Rôle du panturquisme
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Mais l’enjeu de cette lutte va bien au-delà de la région du Caucase du Sud. Ces dernières années, le président turc Recep Erdoğan en particulier a appuyé sa vision du monde turcophone, qui trouve son expression politico-diplomatique dans l’Organisation des Etats turcs. La Turquie, pays le plus peuplé d’Asie centrale, revendique le leadership de ce groupe d’Etats jusqu’ici plutôt informel, qui comprend, outre l’Azerbaïdjan, l’Ouzbékistan, le Kirghizstan et le Kazakhstan.11 Les partisans du panturquisme ne se font que trop volontiers l’écho de telles aspirations, rappelant que des minorités turcophones vivent également en Grèce, en Bulgarie, en Crimée, en Irak, en Syrie, en Afghanistan, en Chine, en Moldavie et en Russie. Avec le corridor Zangezur, l’Azerbaïdjan créerait une liaison terrestre entre les Turcs de la Méditerranée et les peuples turcs d’Asie centrale. Le pays jouerait alors un rôle clé au sein du groupe d’Etats. Avec le contrat de fourniture de gaz naturel que l’Azerbaïdjan a récemment conclu avec l’UE, le pays a déjà réalisé l’aspect économique de cette revendication, à savoir celui de plaque tournante pour le commerce de pétrole et de gaz de la région de la mer Caspienne.12
Bien sûr, les pays membres d’Asie centrale ne souhaitent pas brusquer la Turquie, mais ils ont des expériences historiques, des normes socioculturelles et des systèmes politiques différents.13 Si ces pays ont eu des expériences ambivalentes avec la Russie et l’Union soviétique, ils n’ont pas été impliqués dans l’hostilité qui a séparé l’empire russe et l’empire ottoman. Au contraire, l’Union soviétique et la Russie en particulier ont joué un rôle important dans le développement de la région d’Asie centrale au 20e siècle. La prétention turque au leadership y suscite un certain scepticisme, et se heurte à la solide conscience de soi de ces nations au riche héritage culturel et historique.
Alliés et voisins de l’Arménie
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Toutefois, plusieurs pays d’Asie centrale sont également membres de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) et donc des alliés militaires de l’Arménie.14 En raison de sa taille et de sa puissance militaire, la Russie joue naturellement un rôle majeur au sein de l’OTSC, tandis que les forces armées des républiques d’Asie centrale, à l’exception de celles du Kazakhstan, ne doivent pas être considérées comme aussi puissantes que ne le laissent supposer les chiffres disponibles. Le fait que la Russie soit actuellement engagée militairement en Ukraine peut avoir encouragé le président Aliyev à adopter une attitude plus ferme vis-à-vis de l’Arménie. L’Ukraine et l’Occident pourraient tenter de le motiver à exiger des concessions encore plus importantes. Mais il suffirait que les Etats d’Asie centrale signalent à Bakou que si elle continue de s’en prendre militairement à leur allié, les liens que l’Azerbaïdjan souhaite établir avec l’Asie centrale ne se concrétiseront pas.
L’attitude de la Géorgie, dont l’histoire présente des parallèles importants avec celle de l’Arménie, peut être particulièrement décevante pour de nombreux Arméniens. En tant que petit pays majoritairement chrétien, situé à la frontière entre deux grands empires et entouré de régions à dominante musulmane, on s’attendrait à voir en la Géorgie un allié naturel de l’Arménie. Mais pour Erevan, les flirts des dirigeants géorgiens avec l’UE, l’OTAN et le voisin turc ne présagent rien de bon.
Géopolitique occidentale
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Ces derniers jours, la diplomatie russe a une nouvelle fois poussé les adversaires du Caucase du Sud à négocier.15 Mais les géopoliticiens occidentaux y voient déjà leur chance dans la lutte contre l’Iran et, plus largement, dans la lutte pour l’hégémonie au Proche-Orient16 et pourraient tenter de faire échouer les efforts de paix. Dans cette lutte concurrentielle, l’Occident a récemment perdu des plumes depuis que la Turquie et, ces derniers mois, l’Arabie saoudite se sont de plus en plus opposées à l’influence occidentale. Toutefois, une ingérence des géopoliticiens de Washington et de Bruxelles, qui pensent pouvoir remettre un pied dans la région grâce au conflit du Haut-Karabakh, serait la dernière chose dont les habitants de la région auraient besoin.•
1v. Orkhan Nabiyev: «Baku, Yerevan agree on main points of peace treaty – Turkish FM», ds.: Trend News Agency du 11/10/22, vers. num: https://en.trend.az/azerbaijan/politics/3655527.html et «Armen Grigoryan: there is agreement to sign peace treaty between Armenia and Azerbaijan by end of year», ds: Arka News Agency du 14/10/22, vers. num: http://arka.am/en/news/politics/armen_grigoryan_there_is_agreement_to_sign_peace_treaty_between_armenia_and_azerbaijan_by_end_of_yea/
2v. «PACE President calls on Armenia, Azerbaijan to redouble efforts to resolve conflict», in: News.am du 11/10/22, vers. num: https://news.am/eng/news/724499.html, «Ombudswoman briefs OSCE Minsk Group French co-chair on consequences of Azerbaijan attack on Armenia», in: News.am du 11/10/22, vers. num: https://news.am/eng/news/724505.html, et «Azerbaijan must withdraw its forces from sovereign territory of Armenia: PACE lawmaker haunted by Azeri war crimes», ds: Armenpress du 11/10/22, vers. num: https://armenpress.am/eng/news/1094605.html
3v. «Zangezur, which is currently part of southern Armenia, has been a disputed territory since World War I», ds: TRT World du 29/06/22, vers. num: https://www.trtworld.com/magazine/what-is-the-zangezur-corridor-and-why-does-it-matter-to-eurasia-58405
4v. art. 9 accord du cessez-le-feu du 09/11/2020, vers. num: https://www.bbc.com/russian/news-54886782 en langue russe et https://web.archive.org/web/20201111212431 /http://en.kremlin.ru/events/president/news/64384 (angl.).
5cf. «Schweiz als Vermittlerin zwischen Armenien und der Türkei», ds.: Human Rights du 29/10/2009, vers. num: https://www.humanrights.ch/de/ipf/menschenrechte/aussenpolitik/schweiz-vermittlerin-tuerkei-armenien
6v. «Yerevan, Baku agree to most of ‹Zangezur corridor›, Russian newspaper reports», ds: Civilnet du 29/6/22, vers. num: https://www.civilnet.am/en/news/666581/yerevan-baku-agree-to-most-of-zangezur-corridor-russian-newspaper-reports/
7 v. article 9 accord du cessez-le-feu du 09/11/20 , loc. cit.
8 v. art. 6 accord du cessez-le-feu du 09/11/20, loc. cit.
9v. Arshaluis Mgdesyan: «Attacks on Armenia highlight ongoing disputes over ‹corridor› for Azerbaijan», ds: Eurasianet vom 14.9.2022, vers. num: https://eurasianet.org/attacks-on-armenia-highlight-ongoing-disputes-over-corridor-for-azerbaijan
10v. «Georgia, Azerbaijan, Turkey to share experience in Caucasus Eagle defence drills», ds.: Agenda.ge du 11/10/22, online à l’adresse https://agenda.ge/en/news/2022/3944, et Ministère de Défense, Azerbaïdjan: Baku hosts NATO training course, 10/10/22, online l’adresse https://mod.gov.az/en/news/baku-hosts-nato-training-course-43145.html. Quant à l’Accord de livraisons de gaz entre l’Azerbaïdjan et l’UE v. «EU signs deal with Azerbaïdjan to double gas imports by 2027», ds: Reuters du 18/07/22, vers. num: https://www.reuters.com/business/energy/eu-signs-deal-with-azerbaijan-double-gas-imports-by-2027-2022-07-18/
11cf. Site internet de l’organisation sous https://www.turkkon.org/en/uye-ulkeler. Dans cett organisation, l’Hongrie (!) et le Turkmenistan participent en statut d’observateurs.
12v. «EU signs deal with Azerbaijan to double gas imports by 2027», ds: Reuters, loc. cit.
13à cet aspect, v. notamment Matthias Wolf: «Zwischen Osmanismus, Lenin und Turan – Warum die Turkvölker Zentralasiens ‹auf andere Art türkisch› sind», ds: Deutsches Zentrum für Südkaukasus du 2/.0/2021, vers. num: https://sudkaukasus.de/zwischen-osmanismus-lenin-und-turan-warum-die-turkvolker-zentralasiens-auf-andere-art-turkisch-sind/
14v. le site internet officiel de la OVKS: https://en.odkb-csto.org/
15v. «As result of mediation activity of Russian side, military clashes between Azerbaijan and Armenia have been stopped – President Ilham Aliyev», ds: Trend News Agency du 14/10/22, vers. num: https://en.trend.az/azerbaijan/politics/3657048.html
16L’article suivant en est un modèle: Cavid Veliyev, «Iran’s Frustrations With the Zangezur Corridor», ds: Eurasia Daily Monitor, Jamestown Foundation, 23/09/22, vers. num: https://jamestown.org/program/irans-frustrations-with-the-zangezur-corridor/.
(Traduction Horizons et débats)
3°/Dans le chaos de l’économie du gaz, les gens sont doublement trompés par le Professeur Eberhard Hamer, Mittelstandsinstitut Niedersachsen e. V.
La propagande d’Etat des médias publics affirme, plusieurs fois par jour, que seul Poutine est responsable de notre chaos économique gazier. En réalité, ce n’est pas Poutine qui a mis fin à l’approvisionnement en gaz, mais l’UE, avec l’aide de notre propre gouvernement ayant imposé des sanctions gazières à la Russie. Elle ne veut plus recevoir de pétrole de la Russie d’ici la fin de l’année. |
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Lorsque Mme Wagenknecht affirme, à juste titre, que nous serions débarrassés de tout problème de gaz en une semaine si nous retirions les sanctions, cela a été confirmé par Poutine, mais on reproche à cette ancienne militante de la Gauche de «trahir» le récit gazier imposé à nous tous. Le fait demeure: La crise gazière actuelle et l’urgence gazière imminente ont été provoquées par notre propre gouvernement, dirigé par sa réelle vassalité envers l’UE et les Etats-Unis.
Ces mêmes médias, tout en attribuant la pénurie de gaz allemande à Poutine, confirment par ailleurs quotidiennement qu’il y a suffisamment de gaz dans le monde et que les réservoirs allemands sont suffisamment remplis (plus de 90 %).
On fait donc croire à la population que le pire attendu cet hiver serait une chimère. Pourtant, les gens ont le sentiment légitime d’être, un de ces jours, confrontés à un arrêt du gaz ce qui les a amenés à se procurer des appareils de chauffage électrique en nombre de dizaines de milliers. La population ne croit apparemment plus au deuxième mensonge de son gouvernement.
Robert Habeck est le ministre le plus populaire du gouvernement d’Olaf Scholz
Mr. le ministre Habeck tente de calmer le jeu en affirmant que «toutes les mesures sont prises pour éviter à la population une pénurie de gaz».
L’industrie gazière s’attend
à une pénurie de gaz totale en hiver
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Mais le fait est que même l’industrie gazière s’attend à une pénurie de gaz en hiver, et cela à grande dimension. En effet, sur la base du plan d’urgence gouvernemental du 23 juin 2022, celui-ci peut décréter l’atteinte du niveau d’alerte ce qui lui permettra d’ordonner des mesures exceptionnelles concernant, en premier lieu, les clients dans le secteur dit «non protégé». Si ces mesures ne suffisent pas à stabiliser la situation, il peut s’avérer nécessaire, en raison de la baisse de la pression d’approvisionnement, de procéder également à des restrictions dans le secteur «protégé» et, en cas d’urgence, de réduire l’approvisionnement en gaz jusqu’à sa rupture.
Dans un message circulaire, un fournisseur de gaz a déjà informé les installateurs de gaz qu’ils devaient se préparer à l’état d’urgence du gaz. En cas de chute de la pression dans les conduites d’alimentation, les particuliers ne pourraient pas remettre en service les chaudières à gaz par eux-mêmes, une fois la panne terminée. Le fournisseur de gaz demande donc aux installateurs de fermer la vanne d’arrêt principale et la vanne de l’appareil à gaz jusqu’à ce que le gaz soit à nouveau disponible, et de procéder eux-mêmes à la réouverture de la conduite principale de gaz et des appareils jusqu’à ce que la zone de distribution puisse à nouveau être approvisionnée et que le fournisseur de gaz ait donné aux installateurs l’instruction de remettre les installations en service. Pour la plupart des appareils, les particuliers ne seront donc pas capables de les reprendre en service par eux-mêmes. «Veuillez-vous préparer à ce que de nombreux clients s’adressent à vous (installateurs) en tant que personnel spécialisé pour la remise en service de leurs installations de gaz», écrit le fournisseur.
Les entreprises concernées ont en général entre 300 et 1 000 clients. Mais comme, ces derniers temps, les entreprises d’installation sont soumises à une perte, des maisons aussi bien que du personnel le nombre de clients privé de «leur» d’installateur de gaz augmente.
Concrètement, lorsque le gaz est coupé et qu’un jour, il est à nouveau à disposition, et même en quantité suffisante, les foyers se trouveront, vraisemblablement en masse, confrontés à ce genre de problèmes.
Les ménages peuvent rester confrontés au gel à de températures basses pendant des jours, des semaines, voire des mois, parce qu’ils se verront hors d’état de remettre leurs appareils en marche, obligés de faire appel à un spécialiste. Mais un tel scénario laisse évidemment douter de ce que, à ce moment, nous disposerions du nombre suffisant de ces spécialistes.
Les conséquences de cette situation sont graves. Le gouvernement s’attend à un arrêt des réserves de gaz en hiver et ne l’avoue pas. L’industrie du gaz, elle, s’attend, elle aussi, à un arrêt du gaz et prépare les entreprises artisanales compétentes à cette éventualité. Les entreprises artisanales, elles, savent d’avance qu’elles ne disposeront que de possibilités limitées d’aide en cas d’arrêt du gaz et que des millions de ménages ne pourront pas être servis pendant des jours ou des semaines. Evidemment, les entreprises de distribution doivent garder pour eux ce fait confidentiel n’en soufflant mot à leurs clients «pour ne pas les inquiéter». Ils doivent donc rester dans l’ignorance pour couper court à toute tentative de s’y révolter.
Autre menace: le black-out
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L’effondrement de la pression du gaz prévu par le service du gaz ne peut donc pas être réparé pendant des jours ou des semaines pour de nombreux ménages, faute d’artisans spécialisés, les contraignant ainsi à prendre des mesures d’urgence. Les millions d’appareils de chauffage électrique existants seront alors mis en fonction. Cela seul peut à son tour déboucher sur un black-out du réseau électrique. Du coup, les gens ne disposeront alors plus de gaz ni d’électricité, se trouvant privées de toute perspective d’aide à court terme. En plus, il faudra environ 14 jours pour remettre le système en état de marche, c’est-à-dire pour faire redémarrer les réseaux.
Dans un tel cas, nous aurons affaire à un effondrement de la circulation (feux de signalisation en dysfonction), de l’approvisionnement en eau, à la fin des réfrigérateurs, des achats (caisses enregistreuses en panne), de nos postes de télévision, de la recharge de nos portables, la recharge de voitures électriques remise à un temps imprécis.
Pour couronner le tout, le gouvernement a également arrêté, pour la fin de l’année, toute livraisons de pétrole en provenance de Russie, provoquant ainsi une crise de l’essence (du moins dans les prix) – bien entendu, plutôt engendrée par la haine de Poutine que par une once de raison.
L’objectif de plus en plus évident
des Verts: la désindustrialisation
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Ainsi, si le gaz, le pétrole et l’électricité viennent à manquer en Allemagne et que même l’énergie de substitution des centrales à charbon et nucléaires a été interdite, nous nous rapprochons de plus en plus des vrais objectifs politiques des Verts. La désindustrialisation de l’Allemagne en fait apparemment partie. Si toute la consommation d’énergie était ainsi stoppée, environ 2 % des émissions mondiales de CO2 seraient évitées. Or, en les analysant, on constate que 8 % seulement des émissions sont créés, chaque année, par la déforestation de la forêt amazonienne (que les Verts n’ont pas empêchée) tandis que 30 % proviennent des Etats-Unis et la Chine et 25 % de l’Inde. Selon ce bilan, toute la politique énergétique actuelle en Allemagne repose sur des données quantitatives déjà précaires, capable certes de causer de gros dégâts en Allemagne mais inappropriée à sauver le monde.
Mme Baerbock
Mme Baerbock a confirmé que le gouvernement se fiche des opinions de la population et des électeurs, mais qu’elle se soucie des groupes d’entreprises internationales, servant ainsi avant tout les intérêts des négociants en énergie, pour la plupart étrangers, avec plus de 60 milliards, pour lesquels chaque ménage allemand doit en effet se faire piller à hauteur de 2 000 à 3 000 euros. Le gouvernement a toutefois trouvé une solution qui lui convienne. Il veut exonérer les entreprises d’impôts et de charges sociales, d’un montant de 3000 euros, à condition qu’elles remboursent les surcoûts de gaz à leurs employés. En fin de compte, les entreprises employant des salariés ne doivent pas seulement payer les prix du gaz, multipliés par le gouvernement, mais aussi se saigner pour les cadeaux offerts à des entreprises internationales financés par ce même gouvernement.
Des entreprises au bord de la faillite
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Les PME ont donc raison de s’inquiéter. Après tout, les PME emploient les trois quarts des salariés de toutes les entreprises. En fin de compte, ce sont donc les PME qui se voient être prises en charge, une fois de plus, des erreurs du gouvernement avec des redevances spéciales, avec comme seul «réconfort» la remarque de «leur» Ministre (Habeck) qui leur recommande qu’«ils ne fassent pas d’abord faillite, mais ferment tout simplement».
Le Mittelstandsinstitut Niedersachsen [Institut des moyennes entreprises, Basse-Saxe] craint qu’au cours de l’année prochaine, plus d’un million d’entreprises allemandes de taille moyenne ne périssent à cause de cette politique gouvernementale. Cela signifierait trois à quatre millions de chômeurs, plusieurs milliards de coûts sociaux supplémentaires, ensemble avec plusieurs milliards d’impôts et de cotisations sociales en moins.
On peut s’attendre à ce que la population n’accepte pas cette évolution aussi passivement que d’habitude. La colère monte. Des actions qui peuvent en découler, c’est la première crise économique mondiale qui nous en instruit.
Mettre fin aux sanctions contre la Russie!
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L’AfD (Alternative für Deutschland) et Wagenknecht ont raison de souligner que tout ce chaos énergétique pourrait être évité immédiatement si l’Allemagne mettait fin aux sanctions américaines et européennes contre la Russie, c’est-à-dire si elle n’y participait pas, si elle rouvrait le gazoduc Nord Stream 2 et si, ce que l’on peut déduire des affirmations crédibles de Poutine et deGazprom, elle était à nouveau immédiatement approvisionnée en gaz et en pétrole en quantité suffisante.
Cette seule solution réelle au problème n’est toutefois pas possible avec ce gouvernement belliqueux et vindicatif envers Poutine, qui place l’idéologie et la vassalité avant les intérêts et même avant l’existence des électeurs allemands. Mais même un changement de gouvernement n’aiderait pas, car le plus grand parti d’opposition (CDU) semble résolue à suivre la voi guerrière et attise la haine contre la Russie.
Ainsi comment éviter de marcher, les yeux fermés, vers l’urgence énergétique avec toutes ses conséquences dont nous devrons faire les frais, nous tous?•
Le président de la FIA: «La substance de l‘industrie est menacée.»Une étude récente de la Fédération de l’industrie allemande (BDI-FIA) conclut qu’au vu de la hausse des prix de l’énergie et des matières premières, l’existence même d’un bon tiers des entreprises moyennes en Allemagne est en jeu. Les prix élevés de l’énergie et l’affaiblissement de la conjoncture toucheraient l’économie allemande de plein fouet. Une enquête menée par le BDI auprès des PME industrielles a révélé qu’une grande majorité d’entre elles voit des enjeux élevés (58 %), voire existentiels (34 %) se développer.![]() Le président de la BDI, Siegfried Russwurm, met en garde: «La substance de l’industrie est menacée. La situation est déjà ou sera bientôt cruciale pour de nombreuses entreprises. Le gouvernement fédéral observe comment les usines ferment leurs portes les unes après les autres. 10 % des moyennes entreprises allemandes se voient au bord de leur effondrement. Pendant ce temps, l’industrie allemande payera majoritairement, pour 2023, un prix du gaz huit fois plus élevé qu’aux Etats-Unis.»Le nombre de faillites augmente déjà sensiblement. Ainsi, l’Institut Leibniz de recherche économique de Halle prévoit que pour 2022, il faudra compter avec une augmentation de 12 à 14 % par rapport à l’année précédente.Sources: https://www.business-leaders.net/deindustrialisierung-in-deutschland-angriff-auf-die-substanz-der-deutschen-industrie/; https://www.handelsblatt.com/unternehmen/mittelstand/insolvenzen-was-tun-wenn-ihnen-die-zahlungsunfaehigkeit-droht/28761516.html(Traduction Horizons et débats) |