Bonjour mesdames et messieurs,
Nous venons de mener un entretien approfondi avec le Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité – Josep Borrell.
Nous avons analysé en détail l’état actuel des relations entre la Russie et l’UE. Il est manifeste qu’elles traversent une période difficile aujourd’hui, notamment à cause des restrictions, des sanctions unilatérales illégitimes, qui sont décrétées par l’UE sous des prétextes fallacieux. Nous en avons parlé franchement aujourd’hui.
Des deux côtés a été réaffirmée la volonté de maintenir et d’élargir les canaux de dialogue, notamment dans les domaines où nos positions divergent. Et ils sont nombreux. Nous avons pris note de la disposition à coopérer de manière pragmatique là où c’est intéressant et avantageux pour les deux parties.
Nous sommes d’accord sur le fait que la poursuite de la dégradation des liens risque d’entraîner des conséquences négatives et imprévisibles. Nous espérons qu’au prochain sommet de l’UE, pendant l’examen stratégique des relations avec la Russie prévu pour mars 2021, le choix sera fait au profit d’une coopération constructive, professionnelle et pragmatique.
Des contradictions demeureront, même s’il est préférable de les réduire. Mais nous restons voisins et assumons ensemble la responsabilité du maintien de la stabilité sur le continent européen et eurasiatique commun, de la garantie des conditions de vie les plus confortables pour nos citoyens dans cet immense espace géopolitique. La Russie et les pays européens sont liés par une histoire séculaire commune, la culture et les contacts interhumains. Nous avons beaucoup de choses en commun en ce qui concerne l’économie, même si les échanges ont été divisés pratiquement par deux par rapport à l’année 2012 – record – ou 2013.
On assiste actuellement à une tendance positive: l’UE (en tant que groupe) reste le plus important partenaire commercial et économique de la Fédération de Russie. Les hommes d’affaires de l’UE sont les principaux investisseurs étrangers dans l’économie russe – du moins font partie des principaux investisseurs. Malgré la pandémie, les indicateurs des échanges bilatéraux continuent d’afficher une dynamique positive. Nos relations, notamment l’interdépendance dans le secteur énergétique, doivent être utilisées dans l’intérêt des deux parties. Nous sommes convenus de chercher d’autres secteurs pour nos efforts communs dans le cadre de l’établissement des relations renouvelées.
Nous avons mentionné aujourd’hui la santé, les changements climatiques, la science, l’éducation comme étant des domaines où les experts et les ministres des deux camps peuvent préparer des accords assez significatifs. Nous essaierons de ne pas faire atermoyer ce travail si les collègues européens y sont prêts. Du moins, cette disposition a été exprimée pendant les pourparlers.
Nous souhaitons poursuivre le dialogue politique. Les pourparlers d’aujourd’hui ont réaffirmé que c’était utile, indépendamment du reste. Il existe des initiatives pour développer la coopération dans plusieurs domaines prometteurs, notamment la lutte contre le terrorisme, la narco-menace qui continue d’émaner d’Afghanistan, et d’autres.
Nous avons accordé une attention particulière à la situation au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.
Nous avons également parlé du règlement du conflit israélo-palestinien. Nous avons des approches communes, au profit de la reprise de l’activité du quartet des médiateurs internationaux étant donné que la nouvelle administration de Washington y est disposée. Nous sommes d’accord concernant la nécessité de profiter du « quartet » pour créer les conditions qui permettront de relancer le dialogue direct entre les Palestiniens et les Israéliens, afin d’aider les parties à trouver une solution qui s’inscrirait dans la formule à deux États approuvée par l’Onu et dans le cadre de l’Initiative de paix arabe.
Nous avons également évoqué d’autres points de crise, dont la Syrie et la Libye. Nous comprenons que l’instabilité qui y perdure continue d’affecter négativement la situation en Europe, notamment dans le contexte de l’affluence de migrants et de réfugiés dans les pays de l’UE. Nous pensons qu’il faut travailler pour surmonter les problèmes actuels, sans oublier pour autant la genèse de tout ce à quoi nous assistons aujourd’hui. Il est évident que ces problèmes seraient bien moins nombreux si, à l’époque, certains pays occidentaux s’étaient abstenus de se lancer dans des aventures géopolitiques au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.
Nous continuerons de travailler dans le cadre de la réalisation du Plan d’action global commun sur le nucléaire iranien. Un moment critique arrive. Nous espérons que dans ce sens également l’administration américaine, qui a négocié et a signé le Plan d’action, décidera dans quelle mesure elle pourra revenir au sein de cet accord international important reconnu comme un exploit de la diplomatie multilatérale et étant un modèle d’efforts à engager pour réduire la tension dans différents points chauds et pour renforcer le régime de non-prolifération de l’arme nucléaire.
Nous sommes également prêts à coopérer sur d’autres situations conflictuelles, sur la situation régionale dans l’ensemble. Nous continuerons de nous informer mutuellement des approches qui se dessinent au sein de l’UE et de la Fédération de Russie.
Je voudrais exprimer notre regret du fait qu’à l’heure de la pandémie de coronavirus, alors que, semble-t-il, tous les pays de la planète devraient s’unir et agir solidairement, certaines forces de l’UE ont instrumentalisé ce thème pour accuser la Russie de désinformation.
La Russie a montré par les actes qu’elle était prête à aider tous les collègues intéressés, dont l’UE, dans la lutte contre ce virus dangereux. Si nous voulons vraiment empêcher ces guerres de l’information et les déclarations équivoques, alors nous devons nous entendre avec l’UE sur la création d’un autre canal pour que la discussion sur la désinformation s’appuie sur les faits permettant d’étudier les préoccupations réciproques au niveau professionnel. Notre proposition reste en vigueur.
Nous sommes prêts à soulever les questions relatives aux initiatives de l’UE par rapport à l’espace postsoviétique (Transcaucasie, Asie centrale) pour lequel elle témoigne d’un grand intérêt. Nous espérons que dans sa politique sur cet axe, l’UE prendra en compte les intérêts légitimes de la Fédération de Russie autour de nos frontières, dans les relations avec nos alliés et voisins les plus proches.
Il serait juste de s’entendre sur des principes qui incluraient l’engagement de ne pas s’ingérer dans les affaires intérieures des États souverains, que ce soit dans l’espace postsoviétique, dans les Balkans occidentaux ou ailleurs.
C’était une discussion honnête. Nous n’avons pas caché les différends – tout en étant disposés à les évoquer ouvertement sans « garder rancune ». Nous souhaitons renforcer nos contacts là où c’est bénéfique pour les deux camps. Nous y sommes disposés. Aujourd’hui nous avons entendu des affirmations selon lesquelles l’UE était du même avis.
Je remercie Josep Borrell et son équipe pour ce bon entretien.
Question (adressée à Josep Borrell): Une troisième réunion du Conseil conjoint UE-Cuba s’est récemment déroulée, dont vous étiez le coprésident. Que pensez-vous de l’état des relations entre l’UE et Cuba à l’heure actuelle? Ce format pourrait-il servir d’impulsion pour diminuer la tension entre Cuba et les États-Unis?(adressée à Sergueï Lavrov): Que pensez-vous de la politique actuelle de l’UE vis-à-vis de Cuba? |
Sergueï Lavrov (répond après Josep Borrell): Josep, je ne vois aucune « surprise » à ce que l’on vous pose une question sur Cuba. Quand je visite différents pays, on me pose constamment des questions sur l’Ukraine. Une question vous a été posée sur Cuba parce que vous avez des relations assez notables et importantes avec ce pays. Je pense que c’est un exemple positif montrant comment s’orienter dans la bonne direction, éviter la pression illégitime unilatérale, qui plus est le décret de différentes formes de blocus et d’embargo.
Nous avons la même approche que l’UE: le règlement de tous les problèmes de nos partenaires internationaux n’est possible qu’à travers le dialogue. La pression par la force, les ultimatums, les sanctions, la punition de tous ceux qui veulent développer des relations normales en décrétant des restrictions extraterritoriales sont des méthodes et des instruments du passé colonial.
Malheureusement, l’UE elle-même commence à recourir à de tels instruments, qui sont une invention de marque des États-Unis. C’est regrettable. J’espère que les activités et les événements internationaux à venir, notamment le Sommet des membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies proposé par le Président russe Vladimir Poutine et soutenu par tous les autres membres (le Président français Emmanuel Macron a réaffirmé hier sa disposition positive), et d’autres conférences serviront à déterminer quel monde nous allons construire. Multipolaire – garantissant l’égalité de tous les principaux acteurs – dont l’UE – ou « multilatéral » – qui sert de couverture pour justifier les méthodes de l’ordre mondial unilatéral.
Nous avons entamé aujourd’hui une discussion pour savoir ce qu’est le véritable multilatéralisme. J’espère que nous la poursuivrons. Nous sommes convaincus que c’est le format dans lequel sont représentés tous les pays souverains, en d’autres termes l’Organisation des Nations unies. Quand sont avancées des initiatives concernant un « multilatéralisme efficace », comme l’ont fait l’Allemagne et la France, nous commençons à regarder ce que ce slogan implique:
on découvre alors que l’UE serait un idéal de multilatéralisme et que tout le monde serait censé suivre ce que fait l’UE, qui montre l’exemple à tous
Ce sont des questions philosophiques mais elles ont un aspect pratique, relatif à la politique réelle. Je suis ravi qu’aujourd’hui nous en ayons honnêtement parlé, et notamment des questions que se posent les collègues européens par rapport à la Fédération de Russie. Je trouve que c’est la seule approche correcte.
Sur l’exemple de Cuba se manifeste très clairement le caractère néfaste des approches unilatérales, et la nécessité de les changer.
Question (traduite de l’anglais): En parlant des intérêts communs susceptibles d’unir et non de diviser l’UE et la Russie, je voudrais demander si vous considérez le vaccin Sputnik V comme un moyen de rapprochement ou comme un facteur antagonique qui divisera davantage les blocs? |
Sergueï Lavrov: Il ne s’agit pas de savoir si le vaccin Sputnik V pourra jouer un rôle positif mais de mettre en place une coopération équitable entre tous les producteurs de vaccins.
Quand le Président russe Vladimir Poutine a annoncé la création du Sputnik V, cette nouvelle a été accueillie assez négativement, allant des déclarations sceptiques selon lesquelles « il est trop tôt et personne ne sait encore rien », jusqu’à dire que « les Russes sont pressés de cueillir des fruits géopolitiques ». Mais au fur et à mesure de l’utilisation du vaccin, l’attitude envers ce dernier a évolué. A cela a notamment contribué le fait qu’au tout début, quand le Président russe Vladimir Poutine a annoncé cet exploit des chercheurs russes, il s’est prononcé pour la plus large coopération dans ce secteur avec les partenaires internationaux.
Hier, durant un entretien avec le Secrétaire d’État américain Antony Blinken, a été évoqué le thème du Sputnik V. Il nous a félicités pour les résultats du vaccin. Nous sommes convenus de promouvoir les contacts entre nos laboratoires, chercheurs et producteurs, de voir s’il était possible de coopérer sur ce front.
Nous entretenons des contacts développés avec nos collègues européens à ce sujet. Plusieurs pays sont intéressés par l’achat et la production du vaccin sur leur territoire. La Chancelière allemande Angela Merkel s’est récemment prononcée, lors d’un entretien avec le Président russe Vladimir Poutine, pour une analyse des possibilités de coopération entre la Russie et l’Allemagne.
Le Centre national d’épidémiologie et de microbiologie Gamaleïa est entré en contact avec les producteurs d’AstraZeneca concernant la possibilité de produire une version combinée du vaccin, dont le résultat regrouperait les aspects positifs de chacun d’eux.
Je trouve que la coopération en la matière peut non seulement jouer un rôle positif, mais le fait déjà. Nous le saluons pleinement.
Question: Vous avez dit que les relations entre l’UE et la Russie allaient être revues mais, si je comprends bien, l’UE se base sur les « cinq principes de Federica Mogherini ». Y a-t-il des principes auxquels se réfère la Russie dans la construction des relations avec l’UE? Je me dois aussi de vous poser une question concernant les vidéos transmises à Josep Borrell, Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, et à votre homologue suédoise Ann Linde à la veille des pourparlers. Cela ne vous fait-il pas penser à une vieille plaisanterie soviétique: « Chez vous aussi, on lynche les Noirs? » |
Président ukrainien Vladimir Zelenski
Sergueï Lavrov: Je me suis déjà exprimé plusieurs fois au sujet des « cinq principes de Federica Mogherini ». Ne serait-ce que sur le principe conformément auquel les relations avec nous seront normalisées « dès que la Russie remplira les Accords de Minsk ». En parallèle, le Président ukrainien Vladimir Zelenski déclare qu’il n’apprécie pas les Accords de Minsk mais qu’il devra les maintenir parce que cela permettra de maintenir les sanctions contre la Russie. Ce piège dans lequel l’UE s’est elle-même jetée est très révélateur. Nos questions adressées à Berlin, à Paris, en tant que coauteurs des Accords de Minsk au « format Normandie », pour savoir ce qu’ils pensaient de ces déclarations du Président ukrainien Vladimir Zelenski, restent sans réponse. Pour toute personne sensée, il est clair que c’est une condition absolument artificielle.
C’est pourquoi je n’inventerais pas de principes de notre côté mais je proposerais de nous appuyer sur le droit international, sur les normes et les principes de la Charte de l’Onu, de l’Acte final d’Helsinki et d’autres documents de l’OSCE adoptés au sommet et impliquant le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale, la non-ingérence dans les affaires intérieures et la garantie de l’accès libre à l’information (ce qui n’est pas le cas de nos collègues occidentaux). Sans oublier le dialogue équitable, le respect mutuel et la recherche d’un équilibre des intérêts. Ce sont les fondements de tout dialogue orienté sur un résultat et ne visant pas à tirer des avantages géopolitiques. Évidemment, il faut une réciprocité. Vous avez mentionné le proverbe soviétique « Chez vous aussi, on lynche les Noirs ». Il ne s’agit pas de cela. C’est simplement une dissection rusée du principe de réciprocité.
Si nous sommes tellement préoccupés par les droits de l’homme et le traitement des manifestants, il faut également regarder les images que nous avons transmises à nos collègues suédois et à Bruxelles à la veille de la visite actuelle. Regardez-les. On y voit un tout-terrain de la police américaine rouler sur des manifestants au sol, et bien d’autres. Les images d’une jeune femme plaquée contre un mur par un canon à eau aux Pays-Bas, qui s’en va ensuite pleine de sang, ont fait le tour du monde.
Rien de tel ne s’est produit chez nous. Au cours des dernières manifestations en Russie, des policiers ont été attaqués plusieurs fois et n’ont pas utilisé de moyens spéciaux tels que le gaz lacrymogène. Ce dernier a été utilisé par des manifestants contre la police.
J’ai parlé hier au Secrétaire d’État américain Antony Blinken. Il a abordé la situation autour d’Alexeï Navalny et des manifestants. J’ai demandé s’il y avait des informations qui permettraient de comprendre où sont détenus ceux qui ont été interpellés pendant les événements au Capitole. Selon certaines informations, ils seraient près de 400 personnes. Plusieurs dizaines d’entre elles sont accusées d’assaut contre des policiers. Selon les lois américaines, c’est passible d’une peine entre 1 et 20 ans de prison. Il y a eu de multiples attaques contre la police en Russie lors des dernières manifestations, toutes sont documentées, un travail est mené sur ces affaires.
En Europe également, on trouve de nombreuses situations dans lesquelles les tribunaux sont soupçonnés de prendre des décisions politisées. J’attire l’attention sur une chose qui n’a jamais été mentionnée dans nos déclarations publiques: l’histoire de deux détenus en Espagne condamnés à 10 ans de prison et plus pour l’organisation de référendums en Catalogne, que nous avons été accusés – sans la moindre preuve – d’avoir provoqués. Nous le rappelons étant donné que notre justice a été accusée de prendre des décisions politisées. Les autorités judiciaires allemandes et belges se sont adressées au gouvernement espagnol concernant ces trois Catalans, pour les appeler à annuler les sentences prononcées pour des motifs politiques. Les autorités espagnoles ont répondu: « Vous savez, nous avons notre propre système juridique. Ne pensez même pas douter des décisions prises par nos tribunaux selon nos lois. » C’est exactement ce que nous voulons de l’Occident en termes de réciprocité.
En parlant de transparence dans nos relations, nous nous sommes simplement enlisés dans un thème que l’Occident cherche à repousser au second plan, concentrant toute son attention sur les manifestations et les protestations en Fédération de Russie: je fais allusion à l’établissement de la vérité par rapport à ce qui est arrivé à Alexeï Navalny, quand et où cela s’est produit. J’en ai parlé plusieurs fois. Les médecins civils russes et allemands n’ont rien trouvé de ce que l’on prétend avoir injecté dans son organisme.
Seuls les médecins militaires allemands l’ont trouvé. C’est révélateur. Aucune réponse n’est donnée à nos multiples demandes pour obtenir les résultats de ces analyses – ni par l’Allemagne ni par la France ni par la Suède ni par le Secrétariat technique de l’OSCE devenu si docile et obéissant. Simplement aucune réponse. On nous dit seulement: « Vous savez tout vous-mêmes. » C’est malpoli, et je pèse mes mots.
Cette arrogance de la part de l’Europe cultivée me paraît absolument inacceptable et inadmissible
Mais si les partenaires pensent que nous ne méritons pas les informations qui confirment leurs accusations visant le gouvernement russe, alors que cela reste sur leur conscience. Nous sommes pour l’honnêteté et la transparence. Nous n’énumérerons pas ces principes. Pas besoin d’une approche arithmétique. Je pense que nous comprenons tous de quoi il s’agit.
Question (traduite de l’anglais, adressée à Josep Borrell: Quels « messages » avez-vous transmis à Sergueï Lavrov concernant la condamnation d’Alexeï Navalny, ainsi qu’au sujet des manifestants pacifiques? D’après vous, est-il envisageable que l’UE adopte des sanctions contre les huit oligarques mentionnés dans la liste d’Alexeï Navalny? |
Alexeï Navalny lors de son procès. Photo © Moscow City Court Press Office/T/SIPA
Sergueï Lavrov (ajoute après Josep Borrell): J’ai déjà mentionné ce problème. Je ne vais pas beaucoup commenter le thème d’Alexeï Navalny, les manifestations, les protestations et surtout les doubles standards dans la couverture de ces faits dans les médias. En règle générale, dans leurs reportages sur la Russie, les médias occidentaux déclarent comment la police réagit – sans montrer ce à quoi elle réagit. Pendant les événements en Occident, ils couvrent les excès des manifestants.
Nous sommes pour l’absence de doubles standards en la matière. Il semble que l’on commence à nous entendre. Mais les positions collectives solidaires de l’UE témoignent que nous ne recevrons aucune preuve. Nous comprenons que c’est la position de Berlin. Il en a décidé ainsi depuis le début et l’a annoncé à tout le monde. Le France et la Suède ont suivi l’exemple de l’Allemagne. Je ne suis pas étonné par cette position compte tenu du principe de solidarité au sein de l’UE. Je suis certain que la plupart des représentants politiques, en Europe, ont parfaitement conscience de l’incohérence de cette approche. Ce sont des choses évidentes, si l’on a un rapport respectueux au droit international. Le droit romain, qui est toujours conservé en grande partie en Europe actuellement, est mis en application, stipule que « l’accusation est tenue de prouver ses allégations ». C’est exactement ce que nous demandons.
Concernant les sanctions. Nous le considérons comme une affaire intérieure de l’UE. Nous sommes habitués au recours de plus en plus fréquent par Bruxelles aux sanctions unilatérales sans fondement légitime. Nous développons notre vie en partant du principe que l’UE n’est pas un partenaire fiable, du moins à l’étape actuelle. J’espère que la prochaine revue stratégique attirera tout de même l’attention sur les intérêts fondamentaux de l’UE dans son voisinage proche, et que les pourparlers d’aujourd’hui permettront de déboucher sur une trajectoire plus constructive. Nous y sommes prêts.
Pour conclure, je m’adresse aux journalistes. Il s’agit d’un problème, d’une impasse autour des résultats des analyses effectuées en Allemagne, en France et en Suède. Je suis consterné que les journalistes, qui s’accrochent généralement à des sujets bien moins significatifs et les utilisent constamment dans leurs articles et dans les questions posées aux représentants politiques concernés, fassent cette fois preuve d’une passivité incroyable. Je n’en comprends pas la raison. J’espère que les qualités indispensables des journalistes, qui sont la curiosité et l’aspiration à découvrir les faits, prendront tout même le dessus.
Peut-être que vous organiserez une investigation journalistique (pas une enquête). Existe-t-il dans le monde une autre situation dans laquelle un représentant politique ou une personne revendiquant ce rôle exige des pays étrangers d’adopter des sanctions contre son propre pays? Si un journaliste étudiait cette question, ce serait une revue très intéressante qui serait accueillie par tous avec attention.
Comme le disent actuellement les médias, les bonnes nouvelles ne se vendent pas: tout le monde a besoin de scandales. Mais nous constatons effectivement des aspects positifs aujourd’hui dans les domaines mentionnés: la santé, la science, l’éducation, les changements climatiques. Ce sont les intérêts fondamentaux des grands acteurs voisins sur le continent eurasiatique. Je suis certain que nous chercherons à traduire ces intérêts dans des accords concrets, qui permettront de régler les problèmes globaux de manière confortable pour tous les acteurs.
Je voudrais remercier encore une fois Josep Borrell et son équipe.
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