3633 – Sur Revue « Méthode » – Rosatom … la résurrection d’un géant

par François-Joseph HENRY – Revue « Méthode » – Janvier 2020

Le 20 novembre 2017, la Russie a reconnu de manière officielle être à l’origine d’une fuite de Ruthénium 106, émetteur de rayons bêtas, après avoir été mise en cause fin septembre par l’institut de radioprotection et de sûreté nucléaire française. Les causes de cet incident restent encore très vagues même s’il s’agit probablement d’une erreur faite au niveau du traitement des déchets radioactifs par une des sociétés du géant Russe Rosatom.

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Depuis la tragédie de Tchernobyl du 26 avril 1986 qui a profondément marqué les esprits en Europe, le secteur du nucléaire civil soviétique puis russe a complètement changé la manière de concevoir les centrales nucléaires.

La gestion des risques est devenue centrale à tous les niveaux de la filière et la sécurité a été considérablement renforcée.

En outre Rosatom est le premier constructeur de centrale nucléaire à avoir mis en route un réacteur de troisième génération plus, c’est-à-dire qui prend en compte les conclusions et l’expérience acquise en matière de sécurité après l’accident de Fukushima au Japon.

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A la chute de l’Union Soviétique en 1991, la Fédération de Russie était un des rares pays à posséder une industrie nucléaire complète depuis l’extraction du minerai jusqu’à la construction des réacteurs et le traitement des déchets.

Dans les années 90, le secteur qui était alors morcelé est passé sous le contrôle de Rosatom, agence d’Etat qui a fait renaître le phénix de ses cendres. En effet si la Russie, aujourd’hui, possède moins de réacteurs nucléaires que la France (33 en Russie contre 58 en France) les perspectives de développement domestique sont immenses, car en 2010 seuls 18% de la production d’énergie étaient réalisé par le nucléaire et l’objectif en 2100 est de monter ce chiffre à 80%.

Depuis 15 ans, le groupe brille de manière toute particulière à l’international en damant le pion de manière régulière à Areva, son principal concurrent notamment en Europe de l’Est. Ainsi, chaque année voit un nouveau record du nombre de contrats signé à l’international tomber.

Le plus souvent, ces contrats sont signés dans les pays qui étaient sous influence soviétique, mais pas seulement ce qui fait titrer le quotidien français Le Monde du 8 mars 2017, « Rosatom, l’Europe atomisé » suite à la perte de nombreux contrats par Areva en Europe centrale au profit du géant russe qui commence à se tailler la part du lion.

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La raison de ces succès à répétition et de ce retour très rapide sur la scène internationale est doubles. Tout d’abord, le fait de pouvoir fournir des projets clefs en main grâce à une maîtrise de la filière de A à Z y compris la formation des équipes sur place est un atout indéniable. Mais c’est surtout sur la question du financement que les Russes sont très agiles en proposant des formules moins chères que celles des concurrents et moins contraignantes.

Rosatom. D RUSSIE TUNISIE m121901-5  Signature d’un protocole d’entente pour l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire entre la Tunisie et la Russie

De plus, la volonté en termes de politique internationale de créer un monde multipolaire pousse certains pays comme récemment la Tunisie à diversifier leurs partenariats stratégiques et la Russie est évidemment toute indiquée dans ce cas.

De nombreux pays africains ont ainsi émis le souhait de signer des partenariats avec les Russes pour développer leur industrie nucléaire civil. C’est ainsi que Kirill Komarov le directeur général adjoint responsable des exportations de Rosatom confiait que par une politique exportatrice tous azimuts et agressive la Russie peut espérer en 2025 détenir 1/3 du marché mondiale.

Au vu des récents succès en Finlande en Chine en Hongrie et en Inde, c’est une prévision qui est aujourd’hui tout à fait réalisable.

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Ainsi, il apparaît clairement que Rosatom ne va pas brider ses ambitions à l’international et est un challenger très sérieux pour les géants occidentaux du secteur.
Il ne faut pas perdre de vue le fait que chaque contrat signé pour la construction d’une centrale est aussi un acte diplomatique de coopération internationale bipartite forte. Aussi, il est intéressant de voir comment par l’intermédiaire de sa filière nucléaire civile le Kremlin étend son soft power économique et technologique y compris en Europe et en Afrique, des régions qui lui était jusqu’alors interdites.
F-J. H.

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Revue « Méthode » 

Revue officielle des Instituts franco-russes, « MÉTHODE » a pour but premier le partage des cultures russe et française et le développement du Donbass. Elle s’attache toutefois à être également une revue généraliste en traitant de tous les sujets de société.
Le nom MÉTHODE est usité par les scientifiques, par les sociologues, par les philosophes et par les musiciens ou encore dans le théâtre. Enfin le prénom Méthode est celui de l’évêque de Sirmium ordonné par le pape Adrien II, qui avec son frère Cyril sont connus comme « les Apôtres des Slaves » et reconnus comme saints patrons de l’Europe. Autant de raisons qui nous font espérer que chacun se reconnaisse dans cette publication.
Digne héritière de « Sans Frontières », l’équipe de rédaction de « MÉTHODE » est composée uniquement de rédacteurs bénévoles, pour la plupart experts reconnus dans leur domaine d’activité auxquels se sont joints plusieurs journalistes spécialisés.

Décembre 2019 – Janvier 2020

Chères lectrices, chers lecteurs,

Une année qui s’achève et une autre qui prend naissance… Tout était-il si noir en 2019 ? Beaucoup d’évènements retracés dans différents articles des numéros de Méthode de cette année passée tendent à avoir un optimisme très mesuré… Néanmoins l’échange de deux cents prisonniers au point de contrôle de Mayorsk (RPD) ce 29 décembre est une heureuse nouvelle. Bien sûr nous ne nous berçons pas d’illusions mais nous souhaitons exprimer néanmoins le vœu que l’année 2020 soit celle de la paix retrouvée dans le Donbass et la fin des souffrances de cette population martyrisée.

« Méthode » s’enrichit chaque mois un peu plus tant par la diversité des rédacteurs que par la qualité des sujets traités. Les fins d’années étant toujours la période des bilans, alors qu’il me soit permis de les remercier officiellement car c’est bien grâce à eux que notre revue dénombre chaque mois de plus en plus de lecteurs.

Dans ce numéro vous trouverez beaucoup de nouveaux contributeurs et c’est également grâce à eux que nous pouvons proposer des sujets plus variés ou parfois des sujets déjà abordés mais présentés sous un angle différent, avec un autre regard.

Vous savez (ou vous apprendrez) que Méthode ne bénéficie d’aucune subvention et se refuse à vendre des espaces publicitaires. Cette liberté a un prix… Maintenant vous vous attendez à ce que j’appelle à votre générosité… et bien non ! Nous souhaitons, malgré toutes les difficultés, poursuivre ainsi et vous offrir cette revue qui nous tient tellement à cœur. Pour ceux qui souhaiteraient vraiment nous aider : faîtes connaître « Méthode », invitez vos amis à s’abonner, partager les articles qui vous ont plu sur les réseaux sociaux….

Heureuse année 2020 à vous tous et bonne lecture de ce nouveau numéro.

Elena Sydorova,
Rédactrice en chef 

http://www.revuemethode.org/

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