Marina Kim: « Le Grand jeu » dresse aujourd’hui le bilan de l’année politique. Comment a été 2019 pour la Russie sur la scène internationale? L’invité de cette édition spéciale de notre émission est l’homme qui dirige depuis 15 ans la diplomatie russe, le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. Bonsoir!
Sergueï Lavrov: Bonsoir!
Viatcheslav Nikonov: Monsieur le Ministre, votre récente rencontre avec le Président américain Donald Trump a fait beaucoup de bruit, surtout aux États-Unis. Ce dernier l’a organisée de manière ostentatoire le jour où le Comité du Congrès américain se prononçait sur la procédure de sa destitution. A mon avis, il s’agit d’un trolling politique de très haut niveau.
Comme vous l’avez justement souligné, il est impossible d’organiser aux États-Unis une rencontre un jour ordinaire, car on y évoque sans cesse des sanctions, la destitution, etc. Dans tous les cas, que pensez-vous de Donald Trump?
© AP Photo / Russian Foreign Ministry
Sergueï Lavrov: Ce n’est pas ma première rencontre avec le Président américain Donald Trump. Il m’avait reçu à la Maison blanche en mai 2017, sous l’ancien Secrétaire d’État Rex Tillerson. L’opposition américaine a tenté ensuite de créer un véritable scandale d’espionnage en affirmant qu’on nous aurait transmis des informations secrètes. C’est, évidemment, n’importe quoi, une bêtise absolue montée de toutes pièces. De plus, nous nous sommes parlés avec le Président américain Donald Trump lors de ses rencontres avec le Président russe Vladimir Poutine.
Leur dernier entretien s’est déroulé en juin dernier à Osaka, en marge du sommet du G20. Ainsi, nous nous connaissons assez bien. J’aime sa manière d’évoquer les questions internationales et bilatérales. Il évite les ambiguïtés et essaie de dire directement ce qu’il pense.
Il s’agit d’une approche rare chez les politiciens de niveau très élevé, mais elle est à mon avis très productive car elle permet de mieux comprendre les opportunités, les difficultés et les perspectives des relations, dont nous nous soucions naturellement.
Dimitri Simes: Monsieur le Ministre, le fait que Donald Trump vous a reçu est, à mon avis, très important, notamment compte tenu de la pression qu’il subit en matière de politique russe. Comme on me l’a dit à la Maison blanche – si je ne me trompe pas, le Département d’État américain l’a officiellement évoqué – il existait une entente préliminaire: comme Vladimir Poutine avait reçu le Secrétaire d’État Mike Pompeo, Donald Trump vous recevrait après votre rencontre avec Mike Pompeo.
Donal Trump avait probablement la possibilité d’organiser votre rencontre avec Mike Pompeo loin de Washington – comme l’on lui recommandait certainement. Et tout le monde l’aurait compris d’un point de vue humain, car les contacts de ce genre seraient indésirables dans sa situation politique actuelle. On m’a dit que sa décision d’accepter cette rencontre était liée premièrement à son respect réel envers vous – il rencontre très rarement avec les ministres des Affaires étrangères. Deuxièmement, il voulait montrer son intransigeance face à ses opposants politiques. « Ne me faites pas peur! », comme l’aurait dit Piotr Stolypine. Cette rencontre s’est donc déroulée dans un contexte très difficile pour Donald Trump. A votre avis, a-t-elle été fructueuse ou plus ou moins protocolaire?
Sergueï Lavrov: Premièrement, je pense que l’organisation de la rencontre au début de la procédure de destitution à la Chambre des représentants n’est qu’une coïncidence. La date a été concertée un mois avant mon déplacement à Washington. Selon les traditions des relations russo-américaines, si un chef de diplomatie se rend dans la capitale du partenaire, il est reçu par le chef d’État. Cette coutume existe depuis assez longtemps.
Dimitri Simes: Cela ne concerne que les relations russo-américaines? Ce n’est pas du tout la norme pour les autres pays, n’est-ce pas?
Sergueï Lavrov: Ce n’est pas la norme générale, mais il s’agit d’un élément de principe des relations russo-américaines. Les deux parties se tiennent toujours à cette règle. Oui, si nous nous rencontrons quelque part en Europe, en marge des événements internationaux, il n’y a naturellement aucune condition prévoyant une réception par le Président. Mais quand nous nous rendons dans la capitale de l’autre, cette règle s’applique.
La rencontre n’a pas été vide ou strictement protocolaire. Elle a été substantielle: nous avons évoqué plus d’une dizaine de questions concrètes, notamment les relations bilatérales, la stabilité stratégique, le contrôle des armes et des conflits régionaux tels que le Moyen-Orient, l’Ukraine, la péninsule coréenne etc.
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Nous avons débattu de ces questions de manière absolument directe, sans tenter d’éviter les divergences.
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Nous avons parfois des désaccords très sérieux, notamment sur le programme nucléaire iranien ou certaines autres questions.
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Mais nous voulons dialoguer et Donald Trump l’a confirmé.
A mon avis, il s’agit d’un élément très important. Il a envoyé un message très clair à son establishment, aux collaborateurs de la Maison blanche et du Département d’État: il faut continuer de parler à la Russie. Nous estimons que c’est le seul chemin juste.
Viatcheslav Nikonov: Dans le domaine de la stabilité stratégique, le Traité New Start de réduction des armes stratégiques joue un rôle central. Vladimir Poutine l’a mentionné jeudi en répondant à une question posée par Dimitri Simes lors de la Grande conférence de presse. Monsieur le Ministre, que pouvez-vous dire des chances de prolongation du New Start suite à vos entretiens avec Donald Trump et Mike Pompeo à Washington? Est-ce qu’elles augmentent ou se réduisent davantage?
Sergueï Lavrov: C’est difficile à dire. Je pense que cette question est toujours en suspens. Outre les propos de Vladimir Poutine, qu’il a tenus lors de la conférence de presse du 19 décembre, je voudrais attirer l’attention sur la déclaration qu’il a faite avant l’une de ses réunions régulières avec les dirigeants du Ministère de la Défense et des Forces armées russes.
En ouvrant la dernière réunion de ce type, qui a traditionnellement eu lieu à Sotchi, Vladimir Poutine a évoqué la prolongation du traité New Start et a souligné notre volonté de l’acter immédiatement et sans aucune condition préalable.
Cette précision est assez importante car les États-Unis affirmaient lors des négociations que nos questions sur le respect par les Américains de leurs engagements dans le cadre du Traité empêchaient prétendument sa prolongation sans problème. Comme cette ambiguïté a été levée, nos collègues américains n’ont plus aucune excuse.
Nous comptons sur leur réaction constructive, parce que – comme l’a dit le Président russe Vladimir Poutine – si le Traité disparaissait, nous perdrions le dernier outil de contrôle des armes et le dernier instrument dans le domaine de la stabilité stratégique.
Ce sujet a été évoqué en détail à Osaka. Le Président américain Donald Trump a dit qu’il était nécessaire d’impliquer la Chine dans les négociations. Vladimir Poutine a répondu que nous leur avions posé cette question. Les Chinois ont déjà publiquement commenté la proposition américaine. Ils ont dit que leurs forces stratégiques nucléaires étaient incomparables à celles de la Russie et des États-Unis du point de vue de leur envergure et de leur structure. Ainsi, ils n’ont aucune raison de négocier et ne participeront à ce processus. A Osaka, nous avons indiqué aux Américains que si les Chinois avaient adopté cette position, nous la respections. Si Washington estime qu’il est absolument crucial d’assurer leur participation aux pourparlers, qu’il le négocie avec Pékin.
Nous sommes en principe prêts à examiner des approches multilatérales, mais il faudrait dans ce cas prévoir la participation de la France et du Royaume-Uni (si l’on se limitait aux puissances nucléaires officielles). Il existe également des puissances nucléaires ouvertes, déclarées ou non avouées. Ce processus devra probablement s’enclencher tôt ou tard, mais nous ne forcerons pas nos partenaires stratégiques chinois à rejoindre une plateforme de négociations qu’ils considèrent comme étrangère.
A Osaka, Vladimir Poutine a proposé de s’entendre au moins sur la prolongation du Traité New Start – qui devrait continuer d’être un fondement dans le domaine du contrôle des armes et du renforcement de la confiance – pour continuer parallèlement d’évoquer l’élargissement de la liste des participants.
Lors de l’examen de la position chinoise à Washington, nous avons attiré l’attention sur le fait que la Chine avait évoqué le caractère incomparable des arsenaux. Les Américains ont souligné une chose assez intéressante. Ils ont précisé qu’ils ne parlaient pas de réductions ou de limitations, mais voulaient plutôt s’entendre sur un éventail de conditions mutuellement acceptables, la transparence et les règles de conduite. Je pense que cette approche est intéressante. Mais afin de comprendre si elle est en effet acceptable pour nous et d’autres participants potentiels que les Américains voudraient inviter, il est nécessaire de la voir sur le papier pour bien appréhender comment ils se représentent cette notion-même.
Nous sommes attachés à la prolongation du Traité New Start dans le contexte bilatéral. Nous sommes également prêts à parler dans un cadre multilatéral si les autres pays le jugeaient possible (je voudrais le souligner spécialement). Mais nous ne forcerons personne à rejoindre ce format. A notre avis, si les Américains sont si persuadés de la nécessité de faire quelque chose de nouveau, ils doivent mettre cette certitude sur le papier, la formuler plus concrètement.
Dimitri Simes: J’ai parlé à certains responsables de l’Administration après votre visite. La Maison blanche en a donné une estimation très positive. L’approche du Département d’État était plus prudente. J’ai entendu des choses très intéressantes de la part des militaires Américains. Selon eux, la Russie a absolument raison quand elle souligne l’importance de la stabilité stratégique, mais cette dernière ne peut pas être assurée par le Traité New Start sous sa forme actuelle.
Premièrement, il existe le facteur chinois. Deuxièmement, on a vu apparaître de nouvelles technologies russes et américaines non couvertes par le Traité. A quel point le New Start est une base utile du futur progrès? Ou est-il possible d’atteindre des ententes informelles sur les règles du jeu que vous avez mentionnées, et de faire preuve de ce qu’on appelle au Pentagone une « retenue raisonnable » dans le déploiement de nouvelles armes qu’il considère comme une garantie plus fiable de la stabilité stratégique par rapport au Traité existant?
Sergueï Lavrov: Selon Otto von Bismarck, le rôle décisif dans le domaine militaire n’appartient pas aux projets – raisonnables ou déraisonnables – mais au potentiel. Cette règle est toujours d’actualité. Le Traité est incapable de couvrir tous les problèmes qui existent et qui s’accumuleront dans le domaine de la stabilité stratégique, car de nouvelles technologies ne cessent d’apparaître.
Nous avons déjà dit aux Américains (cet entretien a eu lieu dans le cadre de la Commission consultative bilatérale créée par le Traité New Start) que nous avions présenté nos nouveaux systèmes, notamment nos armes hypersoniques.
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Nous estimons que les systèmes de missiles Avangard et Sarmat sont couverts par le Traité.
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Nous sommes prêts à ce que ces armes et ces systèmes fassent partie du Traité existant (suite à sa prolongation, naturellement).
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Qui plus est, nous avons déjà organisé pour les Américains une présentation grandeur nature de l’Avangard, et nous serons prêts, à une certaine étape, à le faire avec le Sarmat.
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Les autres systèmes présentés par Vladimir Poutine dans son discours devant l’Assemblée fédérale en mars 2018, ne sont pas couverts par le Traité.
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Nous avons souligné notre volonté d’évoquer ces systèmes, ainsi que les nouveaux systèmes technologiques militaires des États-Unis, dans le cadre d’une conversation à part, parallèle.
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Il n’est certainement possible de mener cette dernière que dans le cadre de l’examen de tout l’éventail de problèmes relatifs à la stabilité stratégique.
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Nous avons formulé le Traité New Start. L’un des facteurs décisifs a résidé dans le consentement des Américains à préciser dans le préambule (mais à préciser quand même) le lien entre les armes stratégiques offensives et défensives, en parlant évidemment de la défense antimissile.
Nous n’avons jamais renoncé à la nécessité d’examiner tout l’éventail des problèmes dans le domaine de la stabilité stratégique et tenant compte de tous les aspects de la situation qui influaient sur la stabilité stratégique, notamment des armes stratégiques nucléaires offensives, des armes stratégiques conventionnelles, que les Américains développaient dans le cadre de la conception de frappe globale rapide, ou de la défense antimissile.
Aujourd’hui, quand nous constatons que cette défense antimissile n’a rien à voir avec une protection contre l’Iran, mais revêt un caractère réellement global, nous insistons sur la nécessité d’évoquer les problèmes liés aux projets déclarés de déployer des armes dans l’espace, évoqués non seulement par les Américains mais aussi par les Français.
Le refus américain de ratifier le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires ne rend en aucune façon la situation plus stable et plus rassurante. C’est pourquoi, parallèlement à la prolongation du Traité New Start, tous les acteurs-clés doivent évoquer tous l’éventail de ces problèmes.
Valeri Guerassimov, chef de l’État-major général de l’armée russe
Viatcheslav Nikonov: Valeri Guerassimov, chef de l’État-major général de l’armée russe, a tenu cette semaine des propos assez fermes à ce sujet: « La situation dans le monde reste instable, et son développement revêt un caractère de plus en plus dynamique. Cela s’explique dans une grande mesure par la volonté de certains États d’imposer leurs principes à d’autres pays souverains, y compris par la force. On constate une pression politique, économique et d’information inédite sur les États qui tentent de mener une politique indépendante, notamment sur la Russie. Dans ce contexte, on ne peut pas exclure l’apparition de situations de crise susceptibles de dégénérer et de se transformer en conflit militaire de grande envergure ».
Un « conflit de grande envergure » auquel se préparent les pays de l’Otan. A quel point l’indicateur de danger des instruments de mesure diplomatiques est-il proche de la limite critique?
Sergueï Lavrov: La diplomatie est tout d’abord l’art de présenter ses idées et ses arguments afin de persuader son partenaire.
Ainsi, si l’on analyse la rhétorique des cercles de l’Otan – cela concerne les pays membres aussi bien que le Secrétariat général -, on constate que le degré de russophobie est énorme.
Ce qui m’a surtout impressionné, ce sont les réactions à l’initiative du Président français Emmanuel Macron qui a proposé de réformer l’Otan, de débattre de son avenir (cela concerne ses propos bien connus sur la « mort cérébrale » de l’Alliance qu’il serait nécessaire de guérir, de faire sortir de cet état).
Parmi ceux qui l’ont indirectement dénoncé, on peut notamment citer l’Allemagne: le ministre des Affaires étrangères Heiko Maas et, plus tard, la chancelière Angela Merkel, ont dit que cette approche de l’Otan était erronée car la sécurité de l’Allemagne ne pouvait être assurée que par l’Alliance atlantique.
Franchement, j’ai été frappé par ces propos, qui n’ont pas été tenus par les représentants d’un petit pays souffrant de la mentalité russophobe et de phobies historiques, mais de l’Allemagne, leader de l’Union européenne et de l’Europe. Autrement dit, ces idées et cette paranoïa ont des racines très profondes.
A mon avis, l’un des objectifs principaux de la diplomatie est de changer les éléments de narration. Nous constatons des tentatives en ce sens chez le Président français Emmanuel Macron et plusieurs autres leaders des pays membres de l’Otan et de l’Union européenne. Nous estimons que la nouvelle Commission européenne et les nouveaux représentants des organes dirigeants de l’UE – notamment du service diplomatique européen – devront formuler leur attitude envers le dialogue sur les questions de sécurité politique et militaire sur le continent européen, ainsi que le dialogue sur ces thèmes avec la Russie et d’autres pays qui ne font pas partie de l’UE et de l’Otan.
Henry Kissinger
Dimitri Simes: Vous vous souvenez certainement d’une question posée à Henry Kissinger sur la position de l’Europe. Ce dernier avait répondu: quelle Europe? Quel est son numéro de téléphone? Je pense qu’il serait encore difficile aujourd’hui de préciser l’indicatif téléphonique européen. Ne pensez-vous pas que ce dernier se soit déplacé de l’Ouest à l’Est en 20 ans? Si vous parlez à l’Otan et à l’Union européenne, entendez-vous qu’elles ont un accent polonais et balte de plus en plus prononcé? Ou est-ce une exagération?
Sergueï Lavrov: Non, je suis d’accord avec vous. Comme je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, la position de l’Otan et de l’UE sur la Russie est très malheureusement définie par une minorité russophobe assez agressive. C’est en effet le cas. Quand les pays qui comprennent le caractère anormal des relations entre Moscou et l’Occident nous expliquent dans le cadre bilatéral qu’ils ont un principe de solidarité, qu’ils ne soutiennent pas les sanctions mais sont obligés de rejoindre le consensus, je leur rappelle amicalement que le consensus prévoit l’absence d’objections, et qu’une seule objection est suffisante pour briser le consensus si les deux organisations – l’Otan et l’UE – s’appuient sur le principe de solidarité (ce qui est en effet le cas). On constate des processus difficiles. De nombreux acteurs comprennent qu’une telle situation ne peut plus durer.
Je pense que l’établissement d’une position claire sera l’une des priorités de l’agenda de la nouvelle direction de l’Union européenne. Ils ont cinq principes adoptés il y a quelques années, et qui constituent toujours la base de leurs relations avec la Russie. Tout est bien connu: la Russie doit mettre en œuvre les accords de Minsk, ce qui permettra de lever les sanctions. En attendant, l’Union européenne travaillera avec notre société civile et nos voisins dans le cadre du Partenariat oriental, élargira ce programme à l’Asie centrale. L’UE souligne de manière contrastée que le travail avec les pays de cette région sera établi différemment, en dépit de leurs relations avec nous. Ces cinq principes ne mèneront évidemment nulle part.
Sergueî Lavrov & Mike Pompeo
Viatcheslav Nikonov: Lors de sa rencontre avec vous, Donald Trump a déclaré que les États-Unis avaient intérêt à élargir leurs relations commerciales et économiques avec la Fédération de Russie, et que le niveau actuel, de 27 milliards de dollars, était insuffisant. Votre entretien avec Mike Pompeo a notamment porté sur le Conseil d’affaires Russie-États-Unis: une entente à ce sujet avait été conclue par Vladimir Poutine et Donald Trump encore à Helsinki, mais sa mise en œuvre n’a toujours pas commencé.
Ensuite, les Américains adoptent leur budget militaire dont un article spécial prévoit des sanctions contre le Nord Stream 2. Ils travaillent également à un projet de loi sur les « sanctions de l’enfer », dont on a entendu parler pendant si longtemps.
Enfin, le Congrès américain prépare un projet de loi qui devrait proclamer la Russie en tant que sponsor du terrorisme. Ce contexte soulève la question suivante: quel est le sens de ces entretiens si les États-Unis disent une chose, mais agissent de manière absolument différente?
Concernant les sanctions contre le Nord Stream 2. Vous avez souligné assez fermement que le projet n’était pas menacé. Pourquoi en êtes-vous si certain?
Sergueï Lavrov: Il est menacé. J’ai dit qu’il serait réalisé dans tous les cas, malgré toutes ces menaces.
Premièrement, je suis convaincu que les Européens comprennent bien leur intérêt commercial. Deuxièmement, le projet répond à leur intérêt d’assurer leur sécurité énergétique à long terme. Troisièmement, ils ont été humiliés. Nous avons entendu des propos, y compris de Berlin, qui montraient que nos partenaires européens n’avaient pas perdu leur dignité.
Je suis convaincu que le Nord Stream 2 sera réalisé, tout comme le Turkish Stream qui sera lancé dans deux ou trois semaines.
En ce qui concerne la volonté du Président Donald Trump et du Secrétaire d’État Mike Pompeo de développer le commerce, tandis que le Congrès torpille nos relations à l’aide des sanctions, cela s’explique par le contexte actuel aux États-Unis: à cause de leur volonté de faire revoir les résultats des élections et le vote du peuple américain, ces congressistes sont prêts à faire tout, y compris des choses absolument déraisonnables et peu dignes de politiciens sérieux.
Viatcheslav Nikonov: Répondrons-nous aux sanctions?
Sergueï Lavrov: Nous y répondrons, mais sans nous porter préjudice. Mais nous y répondrons sans aucun doute. Et en tiendrons absolument compte en développant nos relations. Pour moi, cette situation est très difficile à comprendre, parce que la plupart de ces congressistes, de ces membres de la Chambre des représentants, tout d’abord du Parti démocrate, je les connais, directement ou indirectement. Je n’ai jamais pensé que ces responsables pourraient adopter des décisions si honteuses pour un politicien sérieux.
le président du Nixon Center Dimitri K. Simes
Viatcheslav Nikonov: Monsieur le Ministre, vous avez en effet travaillé pendant des années à New York et à Washington. Comment peut-on comparer l’atmosphère actuelle à celle qui y régnait par le passé?
Sergueï Lavrov: Globalement, il s’agit d’une atmosphère de maccarthysme. Je n’étais pas présent à l’époque du maccarthysme, mais je peux bien m’imaginer de tels événements. Dimitri Simes pourrait présenter son opinion à ce sujet. La « chasse aux sorcières », par exemple. Ces termes ont déjà été prononcés par Donald Trump, par les journalistes qui tentent de comprendre ce qui se passe là-bas. Il est dommage que ces cycles électoraux incessants transforment tout le reste en otage du combat politique intérieur aux États-Unis. On organise tous les deux ans des élections, lors desquelles il faut nécessairement obtenir quelque chose pour faire ressentir sa défaite à l’adversaire. Mais que faire? C’est la démocratie…
à suivre…
source/ https://www.mid.ru/fr/foreign_policy/news/-/asset_publisher/cKNonkJE02Bw/content/id/3968263
[…] Source : 3592 – Réponses de Sergueï Lavrov, Ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russ… […]
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