LA GUERRE – « La Défense ! C’est la première raison d’être de l’État ». (Charles de Gaulle) par Dominique BAUDRY- ASAF avril 2022 + Ordonnance du 18 octobre 1945 instituant un Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives
Posté le mercredi 06 avril 2022
Toujours une guerre de retard, trop peu, trop tard et trop lentement. Ces trois adverbes pourraient servir de devise à nos modèles successifs d’outil de Défense qui aujourd’hui doit, dit le Chef d’Etat-Major des Armées, « pouvoir gagner la guerre avant la guerre ». Depuis 1870, nous avons souvent combattu avec une guerre de retard et les Français ont souffert d’être mal équipés pour affronter les défis du moment. C’est un poncif d’évoquer les pantalons garance et le fusil Lebel de 1914 ou les chevaux de 1939 face aux chars allemands.
Dans son ouvrage prémonitoire – l’étrange défaite écrit en 1940 – Marc Bloch explique comment les décideurs et l’administration de l’époque se sont enfermés dans des certitudes, incapables de penser la fonction stratégique et de bâtir une capacité autonome d’appréciation des situations qui est la condition de décisions libres et souveraines.
L’auteur stigmatise aussi la lourdeur de la bureaucratie, la lenteur des chaînes de transmission de l’information, l’impossibilité de savoir quand un ordre a été exécuté, la sous-estimation systématique par les services de renseignement français de l’ampleur de la menace et de la mobilité de l’ennemi, l’incapacité de l’état-major à comprendre la rapidité de mouvement des chars et des avions ennemis et son obsession sur l’infanterie et les canons.
Or, voici soudain, en pleine séquence de guerre ukrainienne, qu’un officier général se fait démettre de ses hautes fonctions dans le Renseignement. A tout le moins c’est le signe d’un malaise dans la capacité française d’anticiper la possibilité d’emploi des armes par l’adversaire. Mais il faut croire également que la bataille contre la volonté de puissance de l’armée russe exige de pouvoir envisager de s’engager dans un affrontement de haute intensité, or nous sommes, en 2022, devant le révélateur de nos propres faiblesses et renoncements.
Un citoyen curieux pourrait sans doute finir par imaginer que l’armée française des guerres hybrides, au Sahel ou dans nos rues pour Vigipirate, n’est constituée que de « supplétifs » mal équipés, alors même que plusieurs meurent au service de la France et des Français ; compassion, émotion, amnésie.
La guerre reste – selon Clausewitz « un acte de violence destiné à contraindre l’adversaire à exécuter notre volonté ». Or, dans cet objectif il faut disposer de la puissance militaire des armes mais aussi de la logistique, de la technologie et du renseignement qui contribue à dévoiler au décideur politique les actions potentielles de l’adversaire afin de choisir les options pertinentes pour imposer un rapport de force autant tactique que stratégique. En l’espèce il faut s’interroger sur l’action diplomatique, informationnelle, industrielle et économique qui en dernier ressort sous-tend l’action politique.
A cet égard, certains voudront rappeler la vision du Général de Gaulle lorsqu’il institua, par l’Ordonnance de 1959, l’organisation générale de la Défense qui s’appliquait à coordonner toutes les actions des ministères en ce domaine sous l‘autorité du Premier Ministre et la tutelle du Secrétariat Général de la Défense Nationale. Peut-être peut-on regretter aujourd’hui qu’au cours des années, en raison de conceptions pacifistes ou mondialistes, l’action interministérielle se soit, sinon évanouie du moins étiolée.
Nombre de textes ont été malheureusement abrogés ou minorés par les gouvernants successifs au moment de l’ajout en 2009 de la composante de Sécurité Nationale.
La guerre tragique en Ukraine, qui secoue toutes les certitudes de la mondialisation heureuse, aura été le révélateur de nos faiblesses et désormais si la France veut gagner la guerre avant la guerre, nul doute qu’il faille une vision et une volonté de longue haleine.
La guerre est un phénomène complexe et absolu qui ne tolère ni indifférence ni approximation. Autant dire que dans cette épreuve cruelle des volontés entre les adversaires il faut au préalable avoir su concevoir des ambitions et consentir à des efforts humains, financiers, économiques matériels et immatériels pendant de longues années.
C’est maintenant une véritable réécriture du discours de Bayeux, du 14 juin 1952, par le général de Gaulle qu’il convient de faire : « la Défense ! C’est la première raison d’être de l’État. Il n’y saurait manquer sans se détruire lui-même ».
Il faut enfin faire usage des dividendes de la paix en investissant, pendant toute la décennie 2030, dans un budget qui procurera aux armées le rapport de force favorable dans une possible « guerre juste » conduite avec conscience, responsabilité et conviction éthique.
La conclusion qui se veut inscrite dans la continuité et la permanence de la souveraineté notre pays… nous est proposée par Victor Hugo (1802-1885) : « L’avenir est une porte… le passé en est la clé. »
Dominique BAUDRY
Colonel (h) et Membre de l’ASAF
Ordonnance du 18 octobre 1945 instituant un Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives
par Sébastien Piecuch et Bénédicte Zielewski – Lycée général et technologique du Hainaut à Valenciennes (académie de Lille)
La création du CEA
Après la Seconde Guerre Mondiale, le général de Gaulle est convaincu de la nécessité de fonder un organisme national consacré à l’énergie nucléaire nouvellement découverte. Après avis du conseil d’Etat, le chef du gouvernement signe l’ordonnance du 18 octobre 1945 qui marque la création du Commissariat à l’énergie atomique (CEA). Frédéric Joliot se voit confier, à partir du 2 janvier 1946, le poste de haut-commissaire, chargé des questions scientifiques et techniques, alors que Raoul Dautry, premier Administrateur général du nouvel organisme, prend en main les questions administratives et financières. Ces deux figures emblématiques de la France de l’époque deviennent les deux premiers dirigeants du CEA.
Présentation
On peut ici rappeler la nature juridique d’une ordonnance. Il s’agit d’un texte législatif mais qui n’est pas issu d’un vote parlementaire. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, pour le GPRF, et dans l’attente de la mise en place de nouvelles institutions par l’Assemblée constituante, les ordonnances sont un moyen de gouvernement efficace, rapide et pratique.
Contextualisation
En tant que président du GPRF depuis juin 1944, le général de Gaulle peut mettre en œuvre une première véritable Défense nationale en prenant diverses mesures qui relèvent à la fois des questions militaires, politiques et stratégiques: une réorganisation du haut-commandement, une unification des trois ministères des armées en un seul ministère, la mise en place d’une année de service militaire (au lieu de deux), l’établissement du SDECE (Service de documentation extérieure et de contre-espionnage) et donc la création du Commissariat à l’Energie atomique (CEA) par une ordonnance du 18 octobre 1945. Il démissionne d’ailleurs le 20 janvier 1946 à la suite d’un vote négatif sur les crédits militaires par l’Assemblée constituante de la IVe République.
Analyse
Le CEA est donc né de la volonté du général de Gaulle alors qu’il s’apprête à quitter le pouvoir. En effet, il est doublement convaincu de l’importance de l’énergie nucléaire.
Tout d’abord, les découvertes scientifiques sont parallèles à sa biographie : né en 1890, il « grandit » avec les apports d’Henri Becquerel, d’Ernest Rutherford, de Pierre et Marie Curie ou encore de Niels Bohr.
La Seconde Guerre mondiale change toutefois la donne : les brevets européens ne sont pas respectés par les Etats-Unis qui cherchent très vite des applications militaires. Dans ses Mémoires de guerre, le général de Gaulle indique d’ailleurs avoir été informé des travaux de Robert Oppenheimer et d’autres physiciens bien avant l’utilisation de deux bombes atomiques en août 1945. Il n’en demeure pas moins que ces « effroyables engins » font surgir chez lui « le désespoir en voyant paraître le moyen qui permettrait aux hommes de détruire l’espèce humaine. » Mais, devenu homme d’État, il a aussi et surtout conscience que la possession de l’arme atomique qui est alors un monopole des Etats-Unis change la donne dans la reconstruction du monde d’après-guerre. Il est évident, pour lui, que la France doit se doter à l’avenir d’une force nucléaire militaire (voire civile) autonome et indépendante.
Plus généralement, l’indépendance nationale passe par des outils scientifiques et technologiques.
C’est tout le sens de l’exposé des motifs de l’ordonnance : « De pressantes nécessités d’ordre national et international obligent à prendre les mesures nécessaires pour que la France puisse tenir sa place dans le domaine des recherches concernant l’énergie atomique. » La création du CEA répond donc à cette volonté de donner à la France libérée son indépendance et ainsi de ne pas dépendre du parapluie américain et/ou britannique à terme. Le CEA est doté d’une autonomie administrative (articles 2 et 3) et financière (articles 5 – 6 et 7) tout en dépendant directement du Gouvernement (articles 1 et 4) quant à son organisation industrielle et ses ambitions.
Ressources complémentaires :
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Institut Charles de Gaulle : L’Aventure de la bombe. De Gaulle et la dissuasion nucléaire. 1958-1969, Plon, 1985.
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https://www.cea.fr/Pages/le-cea/histoire-creation-CEA.aspx
Ce que dit l’Ordonnance
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https://www.cea.fr/Pages/le-cea/histoire-creation-CEA.aspx
Ministère de l’Armée Française
Pour miroir à cette présentation voir sur le site Reseau International » Les Mirages de la Guerre » 12/05/22 .
Enfin pour l’actualité de la chose , Savoir que nous sommes en Europe de l ‘ Est et que le GENERAL HIVER Mettra chacun à rude épreuve .
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