Radio France va vendre une partie de sa colossale collection de disques
C’est un fabuleux butin amassé depuis 1945, gardé jour et nuit par une petite cinquantaine de gardiens dévoués : archivistes, documentalistes, techniciens… Près de la porte d’Aubervilliers, à Paris, 4 000 mètres carrés sont nécessaires pour veiller sur cette fortune qu’on désigne parfois comme “la disco”. Eh oui, ce trésor, c’est le gigantesque fonds de disques intégralement propriété de Radio France… en tout cas pour l’instant. Car la société de service public s’apprête à se séparer d’une partie de son magot.
Au nom de “l’autofinancement”, selon Marc Maret, responsable de la discothèque de Radio France, une vente aux enchères de 5 000 vinyles issus de cette collection vénérable (“qu’on nous envie à l’étranger” ose le préciser L’Humanité) aura lieu le 19 juin à la Maison de la radio. Au coup du marteau du commissaire-priseur se dissémineront aux quatre vents de nombreuses raretés. Un exemple ? Un 45-tours de Syd Barrett sorti en 1969 intitulé Octopus. Mise à prix : 7 000 euros.
Il y en aura apparemment pour toutes les bourses et tous les goûts, notamment “pas mal de musique électronique” comme l’assure Trax. Marc Maret l’a confirmé au site branché électro :
“La sélection électronique est énorme puisqu’elle à démarré dans les années 1960, mais nous ne privilégions aucun style. Le jazz, le classique, le rock auront aussi leur place dans cette vente.”
Alors qu’elle ne prête plus de disques “physiques” aux antennes de son groupe, Radio France est en pleine opération de numérisation mais, avec un fonds aussi imposant, le chantier avance lentement : pour l’instant, 20 % du stock sont numérisés. Marc Maret souhaite qu’à terme, tous les fichiers soient disponibles sur la Discothèque numérique centrale (DNC), version informatisée de ce répertoire bœuf.
Si cette vente aux enchères permettra de faire rentrer des sous dans la caisse, vendre quelques galettes d’acétate parmi les quelque 1,5 million de disques conservés (dont 450 000 vinyles et 220 000 CD) ménagera également un peu d’espace pour les petits nouveaux sur les rayonnages.
Ainsi, les albums de Georges Brassens et des Rolling Stones, les coffrets collectors Barclay, les textes lus, les pièces de théâtre, les entretiens avec Éric Tabarly ou les chansons du Front populaire seront rejoints par les œuvres d’une nouvelle génération d’artistes comme Jeanne Added, Alabama Shakes, Hangman’s Chair, Jacques… et les musiciens qu’il nous plaira d’écouter dans dix, quinze, vingt, cinquante ans.
D’ailleurs, si vous ne pouvez pas vous rendre à cette première vente aux enchères le 19 juin, pas de panique : “On prévoit au moins cinq ventes d’ici deux ans”, rassure Marc Maret. Passionnés, geeks, collectionneurs, amateurs et brocanteurs, vous voilà prévenus.
Radio France lance le site RF8 et lâche ses playlists
Radio France inaugure aujourd’hui la plateforme RF8. Au menu : des playlists par thème pour renouer avec la prescription, dans un contexte de renouveau pour le groupe radiophonique public.

Comme quoi tout arrive. Promis par Jean-Luc Hees, encore président pour quelques jours de Radio France, RF8 a été inauguré ce mardi 6 mai. RF8 ? Mais oui ! Le site de partage et d’écoute du service public radiophonique, constitué des tonnes et des tonnes d’archives musicales collectées depuis 1945 dans “la disco” située à Aubervilliers.
450 000 vinyles, 220 000 CD et deux millions de fichiers au minimum ont été entretenus par les discothéquaires, journalistes et techniciens, pour être précis. Notons que la numérisation est encore en cours : RF8 proposera une trentaine de playlists par semaine, alors que plus de 200 sont déjà à l’écoute dès le lancement de la plateforme.
Annoncée pour novembre, cette plateforme numérique voit finalement le jour aujourd’hui, ralentie dans son élan par la Société civile des producteurs phonographiques (SCPP), gardienne des catalogues des majors, qui n’a pas souhaité signer d’accord collectif. Pourtant, on trouve dans les playlists de la plateforme autant de musiciens célèbres que d’illustres indépendants.
L’agilité des playlists…
En fait, mieux que de simples playlists par humeur, RF8 propose toutes sortes de découvertes. On trouve par exemple le très classique exercice de “l’auto-playlist des Temples”, soit une sélection de titres adoubés par le groupe britannique. Mais aussi une interview du groupe, quelques extraits YouTube, un rapide focus sur leur label… et tout cela sans autre clic fastidieux.
Plus loin, on se réjouit de naviguer parmi des sélections plus bariolées encore : voguez entre l’univers des séries télé (New Girl, True Detective…), la passion pour les musiques noires avec le “Soul Club”, ou encore des collections dédiées aux prénoms, à l’amour, à l’impressionnant catalogue vinyle de “la disco”… C’est bien simple : tout a été pensé pour qu’a priori, il y ait toujours une playlist qui vous convienne.
… fait la force de la prescription ?
La grande ambition de RF8, à terme, est de renouer avec son rôle de prescripteur musical. Pour cela, il s’agit de prouver que Radio France peut s’emparer du numérique et de son pouvoir, afin de parler à ces jeunes qui ont grandi avec Deezer, YouTube et Spotify.
Joël Ronez, le patron du Mouv’, expliquait en métaphore l’importance de la prescription à Libération fin mars :
Devant Deezer, tu es comme une poule devant un couteau : comment utiliser cette ressource ? Il manque quelque chose qui ait ce rôle majeur joué par la radio, la capacité de faire découvrir, de sélectionner une offre

Plus que la conscience du monde qui les entoure, les décideurs juchés au sommet de la Maison de la radio le savent bien : de toute façon, c’est sauter le pas ou bien disparaître : “Il faut que la radio joue ce rôle pour exister encore dans dix ans”, concluait, réaliste, Joël Ronez. Et au vu de ce premier aperçu, cela peut s’avérer payant.
Après tout Spotify et RF8 ne jouent pas dans la même cour : alors que l’un propose à l’auditeur de nouveaux morceaux grâce à un algorithme, l’autre, comme le note Télérama, joue à fond la carte de l’éditorial.
Changement de cap pour Radio France
Le roi est mort, vive le roi. Finie la nomination directe par le président de la République du patron de Radio France : Jean-Luc Hees, alors nommé en 2009 par Nicolas Sarkozy, (“comme au bon vieux temps de l’ORTF”, comme le notait Libération) est sur le départ. C’est le discret Mathieu Gallet qui devrait lui succéder le 12 mai. Et le nouveau chef du service public radiophonique mènera au moins trois chantiers de front.
M. Gallet souhaite alors porter son attention sur la fragile Le Mouv’, qui malgré une audience faible, a été dotée d’une orientation pour les mois à venir : “passer davantage d’électro et de nouveautés, s’intéresser au numérique et produire pour le Web” comme le note Le Monde. Côté classique, France Musique est exhortée à diffuser plus de musique et moins de musicologie. Afin de grignoter des parts d’audience à sa rivale Radio Classique, le nouveau patron souhaite revenir aux bases.
En projet également : redynamiser France Info en nommant Laurent Guimier, ancien d’Europe 1, notamment passé au Lab, site de décryptage politique de la station. Une façon d’affirmer que Radio France ne veut pas perdre ce thème face aux ondes concurrentes, mais aussi lui donner plus de moyens de traiter l’actualité chaude pour se défendre face au web.
Aujourd’hui, Radio France, comme ses audiences l’attestent, n’est pas sur la bonne pente. Mathieu Gallet a du boulot.
source : http://www.konbini.com/fr/tendances-2/rf8-radio-france-playlists/
