
Les BRICS.. la Charte des Nations Unies et pourquoi l’Occident atlantiste fait semblant d’être enacé
Karl-Jürgen Müller
A propos du XVIIe Sommet des BRICS au Brésil
par Karl-Jürgen Müller – N° 16 du 29.07.25 – Horizons & Débats –

Représentants des États membres des BRICS lors du 17e Sommet des BRICS à Rio de Janeiro, au Brésil, le 6 juillet 2025 (de gauche à droite): le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, le prince héritier des Emirats arabes unis, Khaled ben Mohamed Al Nahyan, le président indonésien, Prabowo Subianto, le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, le président brésilien, Luiz Inácio Lula da Silva, le Premier ministre indien, Narendra Modi, le Premier ministre chinois, Li Qiang, le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, le Premier ministre égyptien, Mostafa Madbouly, et le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi.

Le sommet des BRICS de cette année, qui s’est tenu à Rio de Janeiro, au Brésil, les 6 et 7 juillet, a suscité une attention remarquable. Mais de couleurs très variables. Dans les réactions occidentales, le courant dominant a oscillé entre la condamnation absolue et le dénigrement massif.
Ainsi le journal allemand à grand tirage «Bild», titra le 6 juillet,
«Le Sommet des États voyous. Voilà ce que Poutine, Xi et les mollahs préparent contre nous»,
tandis que la «Neue Zürcher Zeitung» proclama en grandes lettres, le 5 juillet, à propos du président des BRICS de cette année, le président brésilien Lula da Silva:
«Malchanceux sur la scène internationale, en manque d’idées chez lui», et le 7 juillet: «Le mythe des BRICS s’effondre».
Et l’ARD, dans ses actualités, a présenté le tout sous le verdict: «
Sommet des BRICS au Brésil: réunion des désunis».
Et les différentes annonces du président américain, sa menace d’imposer des droits de douane punitifs de 10% à tous les pays «participant à la politique anti-américaine des BRICS», ses homélies à l’égard de l’ancien président brésilien Bolsonaro, sa qualification du prochain procès contre celui-ci comme «chasse aux sorcières», ses déraillements verbaux selon lesquels le président russe débiterait des «conneries» ainsi que son annonce de reprendre les livraisons d’armes américaines à l’Ukraine se dessinent comme des diatribes dirigées notamment contre les participants du sommet des BRICS.

Dans la quasi-totalité des pays non occidentaux, c’est-à-dire dans la majeure partie du monde, la tonalité est tout autre.
Dans ce «reste du monde», c’est l’espoir qui prédomine: avec les BRICS, un mouvement est apparu et évolue dans ses efforts pour contribuer dans le but sérieux de réaliser, face à ce monde déchiré, les objectifs formulés par les Nations Unies, fondées il y a 80 ans, après la catastrophe de la Deuxième Guerre mondiale.
En effet, quiconque aura poursuivi un peu plus près les discours ayant nourri l’actuel sommet des BRICS, remarquera les diverses images de coopération réelle entre ses membres, étudiera avec plus d’intérêt la déclaration finale (31 pages et 126 points, voir l’extrait dans l’encadré ci-dessous), se rendra compte des vraies raisons à la base des réactions positives du monde entier, ce qui l’amènera certes au constat qu’aucune nouvelle alliance militaire, aucun nouveau «bloc» contre un autre État n’a été ou n’est en train de se forger ici.

Il constatera par contre que les BRICS constituent une vraie tentative de promouvoir la paix et la justice dans le monde, la prospérité et le bien-être pour tous, la protection de la culture et de la nature, et bien plus encore – et ce en faveur de tous les peuples du monde et dans le strict respect de la Charte des Nations Unies (voir encadré page 5). Toujours est-il que ces buts dictés par la raison présupposent que l’Occident renonce à ses ambitions hégémoniques qui se trouvent en pleine contradiction avec les principes de la Charte des Nations Unies.
le Président indonésien, M. Prabowo
L’insinuation selon laquelle les BRICS constitueraient un «bloc» anti-occidental dirigé par la Chine et la Russie est une chimère tirées de l’imagerie occidentale pour dénigrer «l’ennemi». A Rio de Janeiro, il a été souligné une fois de plus qu’il s’agirait d’améliorer les relations entre tous les Etats et tous les peuples. Pour ne citer qu’un exemple: lors du sommet des BRICS, le Président indonésien, M. Prabowo, nouvellement élu en 2024 (l’Indonésie est membre des BRICS depuis janvier 2025) a souligné sa volonté de «construire des ponts entre le Sud et le Nord».1 Les BRICS, qui représentent déjà plus de 40% de la population mondiale, pourraient également jouer un rôle de médiateur dans les conflits, «sans le poids historique des alliances de l’époque de la Guerre froide». Le président sud-africain, le Premier ministre indien et le président brésilien ont exprimé des points de vue similaires.
Lula da Silva
Lula da Silva a également évoqué ce qui constituerait peut-être un point clé de la résistance occidentale, et notamment américaine, aux BRICS: les BRICS sont une alliance «de pays qui aspirent à une économie mondiale différente», sans les diktats d’un seul pays et sans dépendance à une monnaie unique. Les pays des BRICS effectuent déjà leurs échanges bilatéraux dans leurs monnaies nationales. Lula da Silva a déclaré là-dessus:
« Le monde doit trouver un moyen de garantir que nos relations commerciales ne soient pas nécessairement basées sur le dollar.» Et ensuite : «Je pense que c’est pourquoi les BRICS causent des maux de tête à certaines personnes.»

Dans leur déclaration finale, les États des BRICS condamnent la guerre d’agression israélo-américaine contre l’Iran, la qualifiant de violation du droit international et de la Charte des Nations Unies (v. encadré, point 21).
Ils soutiennent les efforts de paix des Etats africains et du Groupe des Amis de la Paix, fondé en 2024 (lors de l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre dernier), concernant la guerre en Ukraine (v. point 22).
Ils appellent également de manière détaillée au respect du droit international et du droit international humanitaire pour les Palestiniens de la bande de Gaza et des territoires palestiniens occupés (v. points 21 à 27).
Ils adoptent également une position similaire concernant les nombreuses autres zones de conflit et les évolutions dans le monde qui menacent la paix (v. points 29 à 41), toujours en se référant aux déclarations et résolutions des Nations Unies.
Ces déclarations ne constituent pas un soutien unilatéral aux parties au conflit, mais plutôt des exigences de respect du droit international, comme c’est d’ailleurs la mission des Nations Unies et, en particulier, du Conseil de sécurité.
A l’issue du sommet des BRICS, le Président brésilien a été invité à commenter les nouvelles menaces proférées par le Président américain contre les pays des BRICS et les États les soutenant.
Sa réponse:
«Honnêtement, je ne pense pas que je vais commenter ce genre de messages. Je pense pas qu’il soit ni responsable ni sérieux pour le Président d’un pays comme les Etats-Unis de proliférer des menaces dirigées envers le monde, et ce par le biais des médias sociaux numériques. Le monde a changé. Nous ne voulons pas d’empereur. Nous sommes des nations souveraines.»
Et d’y ajouter:
«Au sein des BRICS, nous sommes convaincus que nous ne voulons plus d’un monde sous tutelle. Nous ne voulons plus ni de guerre froide, ni de mépris de la souveraineté, ni de guerre tout court.» (Souligné kjm.) •

1https://thediplomat.com/2025/07/to-be-a-bridge-builder-indonesias-debut-at-the-BRICS-summit/ du 8 juillet 2025

Qu’est-ce que les BRICS?
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Déclaration de Rio de Janeiro: «Renforcer la coopération dans les pays du Sud pour une gouvernance plus inclusive et durable» (extraits)
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Extraits de la Charte des Nations UniesExtraits de la Charte des Nations Unies Préambule «Nous, peuples des Nations Unies, résolus
et à ces fins,
à recourir aux institutions internationales pour favoriser le progrès économique et social de tous les peuples,
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