1/Une année qui commence très mal.
samedi 4 janvier 2020 – alawata-rebellion.blogspot – Erwan Castel
« Le Général Soleimani a été assassiné par les pires individus dans le monde. Leur fierté d’avoir exécuté ce crime ajoute à sa grandeur «

Mike Pompeo, le secrétaire d’État étasunien devait réaliser en ce début d’année 2020 des visites d’influence dans plusieurs pays de la ceinture géostratégique (« Himland ») entourant la Russie comme le Bélarus, le Kazakhstan, l’Ouzbékistan et l’Ukraine par qui il avait prévu d’entamer sa tournée ce 3 janvier, en rencontrant le président Zelensky, mais avant lui le ministre ukrainien de la défense, donnant ainsi le ton de sa venue aux portes de la Russie.
Cette agression illégale étasunienne sur le sol irakien ordonné par le président Trump lui-même, a rendu paroxysmique une nouvelle escalade USA/Iran qui était en cours à Bagdad depuis quelques jours avec notamment un bombardement américain meurtrier de miliciens pro-iraniennes (25 morts), ce qui avait provoqué ensuite l’attaque par des manifestants de l’ambassade des USA.
Mais avec ce nouveau bombardement assassin de l’armée étasunienne, que beaucoup d’observateurs considèrent comme un « casus belli », il est clair que les tensions entre Téhéran et Washington qui vont crescendo depuis que Trump (toujours lui) a décidé en 2018 de se retirer des accords sur le nucléaire iranien, viennent de dépasser brutalement le cadre levantin habituel d’une simple escalade locale et contrôlable pour précipiter le Moyen Orient vers un risque majeur de guerre aux conséquences internationales extrêmement graves.
Qassem Soleimani, la bête noire de Washington


Depuis la décolonisation les occidentaux n’ont eu de cesse que de vouloir conserver leur mainmise sur les ressources minières du Levant (création de l’Arabie Saoudite et des émirats arabes affidés, création d’Israël, pivot et prétexte de leur coalition régionale , décapitations des régimes bassistes non alignés etc…).Et l’Iran est un exemple de cette stratégie hégémonique occidentale : en 1951, les services anglo-américains renversent le gouvernement de Mohammad Mossadegh qui venait de nationaliser l’exploitation du pétrole iranien (« opération Ajax ») et mettent à sa place Mohammad Reza Shah Pahlavi, une marionette autocrate pro occidentale.En 1979, la révolution islamique chasse le shah d’Iran et relance la nationalisation des ressources et l’indépendance réelle pays.Depuis les USA n’ont de cesse que de diaboliser l’Iran qu’ils assiègent militairement et économiquement, progressant chaque année vers une confrontation armée directe. |
Avec cette force spéciale très bien entraînée, équipée et motivée, Soleimani combat les talibans d’Al Qaida en l’Afghanistan, puis en Irak et contre Daesh and Co en Syrie où il prépare le projet d’un État kurde. Au Liban, il forme et soutient le Hezbollah pour que le Sud du pays puisse résister aux attaques israéliennes
Un assassinat illégal et terroriste

Mike Pompeo |
Sauf que…
La décision irresponsable de Trump de faire assassiner le général Soleimani, tout comme de bombarder les milices pro-iraniennes intégrées aux forces de défense irakiennes n’ont aucune légitimité contextuelle et légale, et de nombreuses voix s’élèvent aujourd’hui, y compris du côté occidental pour dénoncer « ce bâton de dynamite lancé dans une poudrière ».
En effet, sur le plan du droit international, les « assassinats extraterritoriaux » perpétrés par un État ne sont légaux que dans trois hypothèses :
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Lorsque le pays où ils sont menés y consent.
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Si le Conseil de Sécurité de l’Organisation des Nations Unies les autorise.
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En cas de légitime défense face à une menace imminente confirmée.
Autre détail, et non des moindres, cet assassinat étasunien a pour la première visé une personnalité étatique iranienne et non des moindres au lieu d’un responsable d »une milice locale pro-iranienne comme c’est la règle habituelle lors d’attaques de drones US.
MAIS toujours sur des cibles non gouvernementales. Le général Soleimani était un haut dignitaire de l’État iranien et Téhéran est donc en droit de considérer son assassinat comme un « casus belli ».
Et maintenant….

- Téhéran promet de se venger de l’assassinat du général Soleimani et des millions de personnes manifestent leur colère et indignation dans les rues iraniennes mais aussi en Irak, au Pakistan, Liban ,Syrie, Yemen etc… Le front de la résistance anti américaine est sur pied de guerre.
- Coté occidental, les forces étasuniennes déployées en Irak et dans le Golfe sont en alerte maximale et de leurs ressortissants ont commencé à évacuer le pays, les alliés arabes des USA sont en état d’alerte et Israël a renforcé ses forces sur sa frontière avec le Liban qui est contrôlée par le Hezbollah.
- De nombreuses diplomaties, y compris occidentales, appellent à la retenue et une désescalade immédiate des tensions et menaces, craignant surtout un blocage du détroit d’Ormuz où transitent quotidiennement 22.5 millions de barils d’un pétrole dont les cours boursiers s’affolent déjà.
Pourquoi et pour qui une telle décision insensée ?
Le déclenchement prochain de la procédure d’impeachment du locataire de la Maison Banche par les néo-conservateurs américains ne doit pas être étrangère à ce coup de poker criminel d’un Trump qui cherche soit à la retarder, soit à la noyer médiatiquement par une crise internationale majeure où sa décision belliciste ne peut que satisfaire les faucons de guerre étasuniens qui en plus n’auront pas à porter la responsabilités des morts américains à venir….
Car je pense que la réaction iranienne « sanglante » promise est inévitable, il en va de la mémoire de la victime autant que de la crédibilité de l’Iran. Mais je ne crois pas que Téhéran qui fait toujours preuve d’une grande retenue dans les crises affrontées aille directement bloquer le détroit d’Ormuz par exemple ou bombarder Israël comme le craignent les propagandistes occidentaux. Je pense plutôt à une attaque ciblée et ponctuelle sur des objectifs étasuniens en Irak, Syrie ou dans le Golfe, laissant ainsi le choix de la guerre total au fou américain…
Mais le pire reste toutefois possible, l’Iran ayant qualifié l’assassinat de Soleiman de « franchissement américain de toutes les lignes rouges » et mis en alerte toutes ses sites de missiles…
Erwan Castel
2/ Le Levant* entre en ébullition
Au lendemain de l’assassinat étasunien à Bagdad du général iranien Soleiman et de Abou Mahdi Mohandes le commandant en second des miliciens pro iraniennes en.Irak , toute la région du Moyen Orient est entrée en ébullition.
- Dès la confirmation de l’attaque étasunienne du 3 janvier et la mort du général Soleiman, l’Iran a promis une riposte sanglante et de nombreuses forces armées dans la région sont mises en état d’alerte (Occidentaux, Iran Israël etc.).
- L’Iran déploie des chasseurs F14 sur ses frontières Sud, Israël renforce sa frontière avec le Liban.
- D’importantes manifestations anti-américaines ont lieu dans les pays majoritairement chiites et des millions de personnes manifestent leur colère en Iran.
- Washington annonce l’envoi de 3500 hommes pour renforcer ses positions en Irak, et invite ses ressortissants à quitter le pays.
- Dans la nuit du 3 au 4 janvier, 5 gros porteurs C130 de l’US air force quittent l’Europe en direction de l’Irak, après des ravitailleurs KC135R de la base de l’OTAN d’Incyrlik en Turquie.
- Une nouvelle attaque de drone étasunien visant un convoi de miliciens pro-iraniens au Nord de Bagdad tuant 6 membres du mouvement Assaib Ahl al-Haq soutenu par les Gardiens de la Révolution iraniens, dont son Commandant, Qais al Khazail.
- Des chasseurs israéliens survolent régulièrement le Sud Liban
- Le Général iranien Gholamali Abuhamzeh des Gardiens de la Révolution annonce que 35 positions américaines et israéliennes ont été ciblées et peuvent être frappées à tout moment.
- Attaque avec 3 roquettes de l’ambassade américaine à Bagdad probablement par des éléments de la milice chiite Hachd Al Chaabi. 3 civils irakiens blessés
- Simultanément une seconde attaque à la roquette vise la base de Balad où sont stationnées des troupes étasuniennes.
- Une autre frappe aérienn de l’US air Force frappe le long de la frontière syro-irakienne fait 5 morts dans une unité de la milice Kata’ib du Hezbollah.
- Des rassemblements et manifestations anti-guerre contre la politique de Trump sont organisés devant des ambassades étasuniennes et aux USA .
- Des sources non confirmées indiquent que plusieurs sites de l’armée américaine ont été la cible de tirs de mortiers.
- Dans le Golfe persique, la Royal Navy britannique renforce ses navires de protection des pétroliers.
- Les premières unités blindées américaines arrivées en renfort via le Qatar font route vers l’Irak
- Un drone d’observation l’US Air force a été abattu à Abar en Irak par la milice Hachd Al Chaabi
- Des chasseurs étasuniens survolent Babel au Sud de Bagdad
- La milice chiite Kata’ib du Hezbollah demande à la population irakienne de s’éloigner minimum de 1 kilomètre de toute position étasunienne à partir de dimanche soir.
- Trump menace à son tour Téhéran, promettant de « frapper très rapidement et très durement » 52 sites « de très haut niveau et très importants pour l’Iran et la culture iranienne » si des américains sont attaqués.
Car menacer de « frapper très rapidement et très durement des sites nationaux très importants de la culture iranienne » ne constitue pas seulement une déclaration de guerre mais aussi une préméditation de crimes de guerre, tels que définis par les conventions de Genève qui interdisent de cibler des lieux civils et religieux.
Il n’est donc pas étonnant que les séides de l’impérialisme étasunien se croient tout permis dans leurs zones d’actions, que ce soient les actuels putschistes boliviens ou le pouvoir ukrainien porté par le coup d’État du Maïdan par exemple qui, soutenus par Washington, pratiquent en toute impunité un terrorisme d’État vis à vis de leurs populations.
La journée de ce dimanche 5 janvier commence donc dans une confusion totale et des menaces lourdes sur toute cette région du Moyen Orient déjà explosive en temps « normal ». Et l’attitude hystérique de Trump – qui est exactement à l’opposé de ses déclarations de campagne sur la politique américaine dans cette région levantine – n’augure rien de bon pour espérer une désescalade rapide de la situation.
Retour sur un assassinat… et une perfidie abjecte !

