2025 – France – bientôt des bad banks ? & Le Crédit Agricole lance des prêts à taux zéro, n’est-ce pas irresponsable ?

France – bientôt des bad banks ?

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Publié le 20 juillet 2017 – Philippe Herlin

On a l’habitude de considérer que les systèmes bancaires malades sont ceux de l’Europe du Sud et de quelques pays de l’Europe centrale, et que l’Europe du Nord, France comprise, se porte relativement bien.

Mais il faut de temps en temps revenir aux chiffres et à leur cruelle objectivité. C’est ce que nous propose l’aride mais très révélateur document du Parlement européen sur les prêts en défaut à la fin 2016 au sein de l’Union Européenne (liste des abréviations des pays) et publié le 13 juillet.

Les prêts « douteux », en défaut ou presque (les Non-Performing Loans – NPL – en anglais dans le document), sont considérés comme tels, selon la définition internationale, lorsque les remboursements accusent un retard d’au moins 90 jours. Autrement dit, la situation est largement désespérée, la reprise des remboursements étant peu probable. La banque peut éventuellement compter mettre la main sur le bien (immobilier ou autre) pour le revendre, mais cette opération prend du temps et se fait toujours à perte.

Or que voit-on dans ce tableau qui récapitule les prêts « non-performants » des pays de l’UE, et qui se montent au total à 1.092 milliards d’euros ?

  • Que certes l’Italie est le pays le plus mal en point, cela nous le savions, avec 276 milliards d’euros de prêts pourris dans les bilans de ses banques,
  • mais qu’en deuxième position vient la France avec 148 milliards d’euros !
  • Suivent l’Espagne (141 milliards d’euros),
  • la Grèce (115 milliards d’euros),
  • l’Allemagne (68),
  • les Pays-Bas (45),
  • le Portugal (41).

Ce très mauvais résultat de la France passe sous les radars du fait que le principal ratio pris en considération ramène ces prêts pourris à la taille du bilan : ce dernier étant considérable (le bilan des grandes banques françaises = 3 fois le PIB national !), ces 148 milliards d’euros finissent noyés.

Or il s’agit là d’une erreur, les éléments et autres engagements du bilan sont peu mobilisables, en tous cas pas rapidement. En cas de crise, ce qui compte c’est le cash, les liquidités, les fonds propres, et lorsque l’on ramène ces prêts défaillants (148 milliards d’euros) aux fonds propres réels des banques (259,7 milliards d’euros fin 2016), on obtient un ratio de 57%.

Plus de la moitié des fonds propres des banques françaises sont menacés par ces prêts défaillants… Ce ratio est surnommé le « ratio Texas », le seul qui compte selon l’agence de notation Fitch.

Alors, aurons-nous bientôt des « bad banks » en France ?

Ou, pour prendre le terme technocratique, des « structures de défaisance » ? C’est-à-dire des organismes chargés de débarrasser les banques de leurs boulets, avec l’aide de l’argent du contribuable, bien sûr.

La France possède une certaine expérience dans ce domaine, nous avons connu cela avec le Crédit Lyonnais au tournant des années 90, on sait faire… Pour l’instant il n’y a pas d’urgence, contrairement à l’Italie, mais en cas d’accentuation de la crise (hausse du taux de défaut, choc financier quelconque), le gouvernement serait forcé d’intervenir.


Philippe Herlin est chercheur en finance et chargé de cours au Conservatoire National des Arts et Métiers à Paris. Il est également contributeur sur le site Goldbroker.com


source/ http://www.24hgold.com/francais/actualite-or-argent-france–bientot-des-bad-banks-.aspx?article=11217821252H11690&redirect=false&contributor=Philippe+Herlin.&mk=2


Le Crédit Agricole lance des prêts à taux zéro, n’est-ce pas irresponsable ?

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Publié le 06 juillet 2017 – Philippe Herlin

On peut gagner de l’argent avec les banques, si, si, c’est possible, et même beaucoup. C’est ce qui est arrivé à Warren Buffett, l’homme d’affaire américain, « l’oracle d’Ohama » comme on le surnomme, en référence à la ville qui héberge son fonds d’investissement (Berkshire Hathaway) et à la formidable réussite qu’il connaît et qui l’a rendu multimilliardaire.

  • En 2011, il a acquis pour 5 milliards de dollars de droits de souscription d’actions de Bank of America, alors sanctionnée pour avoir commercialisé des produits financiers toxiques avant la crise de 2008. Les pénalités financières (16,65 milliards de dollars au total) étant désormais absorbées, la banque s’est redressé et si Warren Buffett convertissait ses droits de souscription en actions, il réaliserait une plus-value d’environ 12 milliards de dollars. Une jolie culbute !

Tout le monde n’est pas perdant lors d’une crise financière et bancaire, même si la probabilité reste mince de s’en tirer à bon compte.

Une nouvelle opportunité s’ouvre d’ailleurs, qui aurait été inconcevable en temps normal, et nul besoin d’être milliardaire pour en profiter : le Crédit Agricole d’Ile-de-France lance son prêt immobilier à taux zéro ! Il est réservé aux primo-accédants et il peut financer jusqu’à 10% du montant total emprunté, dans la limite de 30.000 euros. Les délices des taux zéro enfin accessibles à tous, n’est-ce pas formidable ?

Mais attendez, le Crédit Agricole ne gagne pas d’argent avec ce prêt, il en perd même puisque les taux à long terme demeurent tout de même un peu positifs.

Et si les taux remontent ne serait-ce que modérément, ces prêts qui ne rapportent rien deviendraient une lourde charge dans le bilan de la banque.

  • N’y a-t-il pas là un peu d’inconscience ?
  • Une guerre commerciale pour attirer de nouveaux clients autorise-t-elle la mise en danger de l’entreprise ?

Mais justement, le Crédit Agricole n’est pas une entreprise comme les autres, c’est une banque « too big to fail » (trop grosse pour faire faillite), en cas de catastrophe financière elle est certaine de toujours obtenir le secours de l’État, alors pourquoi s’embarrasser d’inutiles précautions ?

En Espagne et en Italie les banques ont un peu trop joué avec le risque, notamment immobilier, et elles ne finissent pas de le payer. Plusieurs d’entre elles sont techniquement en faillite et elles ne survivent qu’avec des plans de sauvetage rafistolés à la va-vite.

  • La banque espagnole Banco Popular a été rachetée pour un euro symbolique par la Santander, la première banque du pays, qui doit désormais lever 7 milliards d’euros pour ne pas sombrer à son tour…
  • La banque italienne Monte Dei Paschi va bénéficier de 5,4 milliards d’euros apportés par l’Etat, qui va devoir également débourser 17 milliards d’euros pour sauver deux banques régionales, Banca Popolare di Pienza et Veneto Banca. Et de nombreux autres établissements bancaires sont mal en point…

Dans ces sauvetages les déposants ne perdent rien, pour l’instant, mais ceux qui avaient souscrit des obligations bancaires dans leurs plans d’épargne, la plupart du temps sans le savoir, enregistrent une perte sèche.

  • À l’avenir, ce sera peut être plus douloureux, en vertu de la directive européenne BRRD de ponction des comptes bancaires.
  • Et en tant que contribuable, il faudra bien payer un jour ces plans de renflouement.

Non vraiment, à moins d’avoir le flair et les moyens de Warren Buffett, il y a peu de chance de gagner de l’argent en s’appuyant sur les banques. Mieux vaut même s’en éloigner et migrer vers les actifs réels, au premier rang desquels l’or physique bien sûr, car décidément les banques peinent à faire face à leurs responsabilités.


source/ http://www.24hgold.com/francais/actualite-or-argent-le-credit-agricole-lance-des-prets-a-taux-zero-n-est-ce-pas-irresponsable-.aspx?contributor=Philippe+Herlin.&article=11148620092H11690&redirect=False