L’Usine des Matières premières
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Ce mardi 19 avril, le secrétaire d’État britannique aux entreprises Sajid Javid, qui doit gérer la vente de plusieurs aciéries du Royaume par Tata steel, a fait le déplacement à Bruxelles. Avec Emmanuel Macron et la commissaire européenne au Commerce Cécilia Malström, il doit participer à une nouvelle réunion, sous l’égide de l’OCDE cette fois, pour se pencher au chevet de la sidérurgie.
L’institution qui regroupe les principales économies développées espère parvenir à un accord de principe pour réduire à long terme les surcapacités et éviter le retour du protectionnisme. Fin 2015, les surcapacités d’acier – principalement en Chine – sont supérieures à 700 millions de tonnes. De quoi alimenter une guerre commerciale dans l’acier. Les exportations chinoises ont progressé de 20 % tandis que les exportations européennes ont reculé de 8 %. Dans le même temps, les importations ont progressé de 18 % en Europe, tandis qu’elles ont reculé de 11 % en Chine et aux États-Unis.
Mesures anti-dumping en hausse
En 2015, le nombre de mesures antidumping a atteint un plus haut niveau historique, selon le décompte de l’OCDE. L’an passé, 41 nouvelles procédures ont été ouvertes. « Certaines économies qui n’avaient pas recours à ces instruments les ont utilisés », souligne l’OCDE.
La tendance s’est encore accélérée en début d’année, avec 12 procédures répertoriées sur les deux premiers mois de 2016. « La forte augmentation de procédures antidumping est désormais plus importante que celle qui avait été observée dans la précédente crise de l’acier fin des années 1990″, estime l’OCDE, qui souligne que si les mesures antidumping se sont concentrées ces derniers mois surtout sur les produits à plus forte valeur ajoutée, comme les laminés à froid ou les aciers plats.
Nombre de nouvelles procédures antidumping dans le monde (source: OCDE)
Mais dans cette bataille mondiale, l’Europe part avec un coup de retard. Depuis le début de l’année, Emmanuel Macron ne se prive plus de critiquer la lenteur des procédures d’enquête de la Commission européenne, avant d’imposer des taxes anti-dumping. En février, le ministre français avait signé une lettre ouverte avec sept autres ministres, dont le Britannique pour réclamer le renforcement des outils de défense commerciale de la Commission.
Réaction timorée européenne
Car jusqu’à présent, la Commission réagit de façon plus timorée que les États-Unis. En février, la Commission européenne a ainsi imposée entre 13,8 % et 16 % de taxes sur les produits laminés à froid en provenance de Chine. Deux semaines plus tard, le département du Commerce américain a lui décidé de porter à 265 % les taxes anti-dumping contre certains produits chinois.
Trop naïfs les Européens ?
Problème : à Bruxelles, le renforcement des mesures anti-dumping, proposé par la Commission européenne en 2013, ne font pas l’unanimité.
- La Grande-Bretagne en particulier, traditionnellement favorable au libre-échange, s’est opposée à une hausse des barrières tarifaires. Et tant pis pour la sidérurgie britannique, violemment touchée par la crise actuelle.
- Londres fait aussi partie des avocats à Bruxelles d’une reconnaissance dès la fin de l’année du statut d’économie de marché à la Chine.
De son coté, la Chine sait aussi jouer à plein des divisions européennes. Début avril, Pékin a décidé d’imposer des mesures de rétorsion en taxant à 46 % sur certains types d’acier à très haute valeur ajoutée, notamment produit au Pays de Galles. Histoire d’aiguiser encore un peu plus les débats entre pro et anti-barrières tarifaires en Europe.
[INFOGRAPHIE] Acier brut, aluminium, ciment… Zoom sur les surcapacités industrielles de la Chine
Par Julien Bonnet – Publié le 26 février 2016, à 13h58
Alertée par les industriels, l’Europe se préoccupe de plus en plus du dumping chinois, lié à l’incroyable vague d’investissements dans son appareil productif au cours des dernières années.
C’est le cas notamment dans l’industrie sidérurgique, mais pas seulement. Ciment, raffinage, construction navale… une étude de la Chambre de commerce européenne en Chine fait le point sur les différents secteurs concernés qui font aujourd’hui face à des excédents de capacités.
La Chambre européenne de commerce de l’Union européenne à Pékin tire la sonnette d’alarme sur les surcapacités industrielles en Chine. Alors que la situation préoccupe de plus en plus les industriels du Vieux continent victimes du dumping chinois, une étude fait le point sur les différents secteurs concernés. Ces chiffres permettent de se rendre compte du gigantisme productif chinois.
- En 2011 et 2012 la Chine a produit autant de ciment que les Etats-Unis pendant tout le XXe siècle !
L’étude explique également les raisons qui ont mené à de tels excédents de capacités : un surinvestissement, entretenu par des crédits et subventions accordées aux industriels chinois, dans un contexte de ralentissement des demandes mondiale et également chinoise, dans les secteurs de la construction de bâtiments par exemple.
Le régime chinois s’attaque à ce problème en cherchant à imposer de nouvelles réglementations plus strictes ou en durcissant sa politique de prêts et subventions mais se heure à la résistance des gouvernements locaux (provinces et municipalités), qui craignent de voir l’emploi et les recettes fiscales pénalisés.
SOURCE /http://www.usinenouvelle.com/editorial/infographie-acier-brut-aluminium-ciment-zoom-sur-les-surcapacites-industrielles-de-la-chine.N381767
« La façon dont fonctionne le marché de l’acier chinois n’est pas acceptable », estime Philippe Darmayan d’ArcelorMittal
Par Olivier James – Publié le 09 février 2016, à 10h55
Le sidérurgiste vient d’annoncer une perte record de près de 8 milliards de dollars. La compétitivité de la production européenne d’acier pose plus que jamais question. Le président d’ArcelorMittal France, Philippe Darmayan, estime que le secteur est menacé si les autorités européennes ne réagissent pas rapidement. L’objet de toutes les crispations: la Chine.

Crédits WorldStell CC Flickr
L’Usine Nouvelle.- Comment expliquer la perte de 8 milliards de dollars annoncée par ArcelorMittal ?
Philippe Darmayan. Elle est due essentiellement à une dépréciation de nos actifs.
- Sur les 7,9 milliards de pertes annoncés, 4,8 sont dues aux dépréciations, surtout dans le secteur minier, et le reste à des charges exceptionnelles liées à la perte de valeur des stocks en raison de la chute des prix de l’acier.
La situation du marché est très critique. La Chine accuse 300 millions de tonnes de surcapacités de production d’acier, sur une production de 800 millions de tonnes. Des chiffres à comparer à la capacité européenne qui s’élève à 150 millions de tonnes et celle des États-Unis à 120 millions de tonnes. Cette situation de surcapacités s’explique par le fait que les Chinois ont tablé sur une base de croissance de 10% et que depuis un an, l’économie chinoise est à l’arrêt dans l’acier. De ce fait, une partie de la production d’acier ne trouve pas d’utilisateur sur le marché. La croissance européenne du secteur, comprise entre 1 à 2% en 2015, a été complètement absorbée par la croissance des exportations de la Chine en Europe.
Quel est le niveau des importations d’acier chinois ?
Les importations ont cru de 25% entre 2014 et 2015. Avec, comme corollaire, une baisse des prix de l’acier chinois sur le marché européen, auquel s’est ajoutée la baisse du prix des matières premières. En résumé, la croissance chinoise a eu deux effets. D’abord sur la production d’acier et son prix, puis sur le prix des matières premières. Nous sommes victimes d’une double peine.
Quelles vont être les conséquences sur le développement d’ArcelorMitttal en Europe ?
Nous avons la conviction, preuves à l’appui, que les baisses de prix de l’acier chinois résultent de dumping, autrement dit de subventions du gouvernement chinois. Nous sommes en train de mener une action auprès des gouvernements et de la communauté européenne pour mieux surveiller les prix chinois et pour lancer une opération anti-dumping vis-à-vis des Chinois. Aujourd’hui même est publiée une lettre des ministres de l’Économie adressée à la Commission européenne et au Conseil, à laquelle le ministre de l’Économie Emmanuel Macron a largement contribué. Nous demandons à ce que la Chine accepte des conditions concurrentielles acceptables par rapport à l’Europe.
Le secteur dénonce depuis plusieurs années ces pratiques. Pensez-vous être cette fois-ci écouté ?
Nous n’avons jamais eu autant de chances d’être écoutés à Bruxelles qu’aujourd’hui grâce à Emmanuel Macron. Concrètement, l’objectif est de mettre en place des taxes qui compensent les anomalies aujourd’hui constatées. Pour le moment, la façon dont fonctionne le marché de l’acier chinois, véritable entreprise d’État, n’est pas acceptable. Les droits de douane doivent porter les importations chinoises à l’égal de l’acier européen.
La production d’acier européenne est-elle menacée si aucune décision n’est prise à l’échelle européenne ?
Oui, on peut dire ça. Je suis de nature optimiste, donc je pense que les mesures seront prises dans un sens satisfaisant. La mobilisation qui va se traduire le 15 février à Bruxelles par une marche des aciéristes et un soutien prononcé des ministres de l’économie va dans le bon sens.
Dans quelle mesure l’acier chinois, bas de gamme, menace-t-il la production européenne davantage positionné dans le haut de gamme ?
Nous sommes effectivement protégés sur nos aciers haut de gamme, mais ils ne représentent pas la majorité de nos produits. Vous ne pouvez pas produire uniquement du haut de gamme destiné à des niches de marchés. Le site d’ArcelorMittal de Fos-sur-Mer, par exemple, qui produit du laminé à chaud destiné aux usines de transformation dans le pourtour méditerranéen, est concurrencé par les usines chinoises. Si je cite a contrario l’usine de Dunkerque, elle est moins attaquable du fait du volume de spécialités qu’elle produit.
Avez-vous des inquiétudes quant à l’avenir du site de Fos-sur-Mer ?
Non, je n’ai pas d’inquiétudes. Nous avons déjà dit qu’il pouvait y avoir temporairement des opérations de chômage partiel. Ce que nous n’avons pas mis en œuvre aujourd’hui. Aussi longtemps que nous pourrons tenir, nous tiendrons. Nous sommes transparents sur cette question de nos problèmes de compétitivité. Nous avons décidé de fermer temporairement notre usine en Espagne de Sestao. Nous n’avons pas décidé aujourd’hui de mesure semblable à Fos-sur-Mer.
Pourquoi avoir vendu vos parts dans Gestamp alors que le marché automobile représente un segment porteur pour l’acier ?
C’est une société exceptionnelle spécialisée dans l’estampage, cliente d’ArcelorMittal depuis longtemps. Nous avons des projets commun de R&D, comme d’ailleurs les procédés d’estampage de l’Usibor. Mais Gestamp n’est pas dans le cœur de notre activité. Nous conservons toutes nos relations en termes de recherche et développement. Cette entreprise reste un de nos partenaires privilégiés, mais nous devons nous désengager pour poursuivre notre objectif de baisser le niveau de l’endettement.
Malgré la croissance continue du groupe depuis dix ans, vous faites face à une situation difficile. Comment l’expliquer ?
Le milieu de l’acier est très déconcentré. Ces vingt dernières années, il s’est déconcentré encore davantage avec la croissance de la Chine. Tous les acteurs de l’acier font face au même problème de surcapacités. Nous avons d’une certaine façon commencé à régler le problème en diminuant les surcapacités européennes, avec nos opérations de fermeture de sites à Liège, en Belgique, et à Florange, en Moselle. Nous avons conservé nos hauts-fourneaux européens les plus compétitifs pour être capables de concurrencer la Chine. Rappelez-vous qu’au début de l’année 2015, la situation était assez favorable pour l’acier. La situation n’a changé que depuis le milieu de l’année.
Alors que Nippon Steel augmente ses parts dans Vallourec, ne craignez-vous pas de vous faire rattraper par certains de vos concurrents en raison de votre forte dette ?
Vallourec est sur le marché du pétrole dont la problématique est différente. Pour revenir à ArcelorMittal, la direction du groupe a pris les devants pour à la fois diminuer la dette nette en décidant une augmentation de capital de 3 milliards de dollars et pour améliorer la compétitivité et restaurer les résultats du groupe en lançant le plan Action 2020.
Vous comptez investir encore en Europe ou au contraire diminuer les capacités de production ?
La stratégie sur l’Europe est de continuer à faire de la R&D, de fabriquer des produits qui correspondent aux besoins des industriels de l’économie verte, comme des aciers toujours plus résistants, toujours plus fins.
La réforme du système d’échanges de quotas de CO2, qui entre bientôt dans sa quatrième phase, vous inquiète-t-elle également pour votre compétitivité ?
Tout à fait. Cette question fait partie de la lettre envoyée à la Commission européenne. En juillet 2015, la Commission a émis une nouvelle directive pour renforcer ce système, le rendre plus contraignant. Nous avons le sentiment que toutes les industries tournées vers le commerce international seront touchées, du fait que nous n’avons pas en Europe le même niveau d’engagement de réduction des émissions de gaz à effet de serre par rapport à des pays comme la Chine et l’Inde. Une fois de plus, cela crée une distorsion de concurrence. Dès 2017, certains sites européens seront amenés à payer des droits d’émissions de CO2 qui vont les mettre dans des conditions de non-compétitivité accrue par rapport à des sites étrangers concurrents.
La possibilité que la Chine acquière le statut d’économie de marché est-il aussi de nature à vous inquiéter ?
C’est un autre sujet délicat. Les autorités chinoises souhaiteraient acquérir ce statut dès 2016, dans le cadre d’accords passés avec l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Or les conditions dans lesquelles le business se fait en Chine ne correspond pas aux conditions de fonctionnement de l’OMC. Nous sommes préoccupés. Soit il faut retarder cet accord, soit définir des conditions acceptables. Mais d’une manière générale, il ne faut pas être catastrophiste. Les actions des autorités à Bruxelles me paraissent de nature à répondre à nos préoccupations. La commissaire européenne vient de demander aux chinois de réduire leurs capacités. Ils ont annoncé qu’ils allaient opérer des réductions, de près de 150 millions de tonnes. La situation est bien en train de bouger.
Propos recueillis par Olivier James
SOURCE/http://www.usinenouvelle.com/article/la-facon-dont-fonctionne-le-marche-de-l-acier-chinois-n-est-pas-acceptable-estime-philippe-darmayan-d-arcelormittal.N378197
Sept pays appellent l’Europe à agir contre le dumping chinois sur l’acier
Dans une lettre datée de ce vendredi 5 février et que Reuters a pu consulter, les cosignataires de sept pays, parmi lesquels le Français Emmanuel Macron, s’inquiètent de l’état de l’industrie sidérurgique en Europe.

Les ministres de sept pays européens, dont la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, exhortent l’Union européenne à prendre des mesures destinées à protéger le secteur sidérurgique européen de la concurrence jugée déloyale de la Chine et de la Russie.
« (Elle) est confrontée à des pratiques commerciales déloyales récurrentes dans un contexte de forte concurrence internationale intensifiée par une situation de surcapacité internationale », peut-on lire dans ce courrier.
« L’Union européenne ne peut rester passive lorsque l’augmentation des pertes d’emplois et des fermetures d’aciéries montre qu’il existe un risque important et imminent d’effondrement du secteur européen de l’acier », lit-on également.
« Nous lançons conjointement un appel aux institutions européennes à utiliser tous les moyens disponibles et à agir fortement pour répondre à ce nouveau défi », écrivent encore les ministres.
Cette lettre est adressée à Jyrki Katainen, vice-président de la Commission européenne, et aux commissaires Elzbieta Bienkowska et Cecilia Malmström, respectivement chargées de l’Industrie et du Commerce, ainsi qu’au ministre de l’Industrie des Pays-Bas, dont le pays assure la présidence tournante du Conseil de l’UE.
Parmi les signataires figurent, outre les ministres français, allemand et britannique, des représentants polonais, italien, belges et luxembourgeois.
« ANTIDUMPING »
Emmanuel Macron est à l’origine de cette démarche, dit-on au ministère français de l’Économie.
« Les ministres signataires ont voulu donner un signal de mobilisation à la Commission européenne et à leur collègue pour que les procédures européennes antidumping soient activées plus souvent et plus vite », précise-t-on à Bercy.
« L’idée du ministre était d’agir vite et de lancer à la fois un signal un peu ferme de mobilisation, mais aussi de jouer le jeu européen », ajoute-t-on.
La Commission européenne s’était déjà saisie de ce dossier, dans lequel la Chine et la Russie sont accusées de tirer les cours mondiaux vers le bas.
Récemment, Cecilia Malmström a adressé une lettre au ministre chinois du Commerce pour appeler Pékin à réduire ses surcapacités tout en annonçant l’ouverture, dans le courant du mois de février, de trois nouvelles enquêtes sur les importations d’acier en provenance de Chine.
La commissaire européenne a également exprimé son inquiétude face au bond d’environ 50% des exportations chinoises constaté en 2015 et à la chute des prix qui en a résulté, de moitié pour certains produits.
Mais les signataires attendent une réaction plus ferme de l’UE.
« En premier lieu, la Commission devrait recourir pleinement et de manière appropriée à la gamme complète des instruments de politique commerciale de l’UE pour lutter contre le commerce déloyal », lit-on dans la lettre du 5 février.
« Cela comprend l’adoption de mesures rapides et appropriées dans les cas antidumping en cours, tels que l’enquête sur les produits plats en acier laminé à froid originaires de Russie et de Chine », poursuivent les ministres.
Selon la Fédération européenne de l’acier (Eurofer), l’industrie sidérurgique a perdu 85 000 emplois depuis 2008.
Avec Reuters (Simon Carraud, avec Sybille de La Hamaide, édité par Danielle Rouquié)
SOURCE/http://www.usinenouvelle.com/article/sept-pays-appellent-l-europe-a-agir-contre-le-dumping-chinois-sur-l-acier.N377966

