181- L’inéluctable ascension de l’économie du partage

par Frédéric Mazzella (Président – Fondateur de BlaBlaCar) –Publié le 10 janvier 2016 par ERASME
Portée par le bon sens économique, ses vertus sociales et environnementales, et l’enthousiasme des utilisateurs, la rupture positive de l’économie du partage est en marche !

Que se passe-t-il lorsque nous avons soudain la capacité de mettre en réseau un nombre illimité d’êtres humains ? Lorsque les coûts de transaction, le temps, ou la distance sont réduits à néant ? Et que le monde est instantanément accessible du bout de nos doigts sur nos smartphones ?

L’Homme se retrouve alors libéré de contraintes historiques et fait ce qu’il sait faire de mieux : il échange, il partage. Il transparaît alors de ces échanges que chacun détient des actifs de grande valeur, qui pourtant sont sous-utilisés, et peuvent être utiles aux autres.

Grâce à des plateformes qui facilitent la mise en réseau et la création de confiance entre individus, les particuliers ont soudain la possibilité de partager l’usage de biens, de la connaissance, de l’argent, du temps, du contenu… Ils recouvrent leur capacité à contribuer plus directement à la société et à l’économie, et ce à une échelle inédite, l’échelle planétaire, révolutionnant au passage les relations entre acteurs économiques et sociaux.

Nous sommes à l’aube d’une nouvelle ère, celle du partage

Ces modèles prospèrent d’ores et déjà sur tous les continents, avec une résonance universelle. Nous sommes à l’aube d’une nouvelle ère, celle du partage, qui impacte toutes les dimensions de nos échanges :

Partage de biens

L’accès facilité aux actifs des autres devient tel que l’on valorise davantage l’usage que la possession, qui s’accompagne elle de contraintes pratiques et financières. On préfère partager l’utilisation d’un bien que de le posséder, surtout pour les biens chers et lourds en “maintenance”. La voiture et le logement sont de bons exemples, et ont récemment donné naissance aux plateformes de location de voiture entre particuliers (Drivy, OuiCar, GetAround, TripnDrive), de covoiturage (BlaBlaCar), d’échange d’appartements (LoveHomeSwap, HomeExchange, Guest2Guest), ou de location d’appartement à courte durée (AirBnB, OneFineStay).

Partage de connaissances

Wikipedia ou les MOOC (Massive Open Online Courses tels Khan Academy, Udemy, Coursera, 360 Learning ou OpenClassRooms) rendent l’accès à la connaissance quasi universel. On collabore sur la création de contenu et partage la connaissance sans limite. Son effet multiplicateur devient ainsi infini. Les MOOCs donnent aujourd’hui accès aux classes des meilleurs professeurs à la demande, en ligne, où que l’on soit, et à toute heure du jour et de la nuit. La meilleure connaissance est ainsi accessible tout le temps, partout, à tous. C’est une révolution.

Partage d’argent

Une idée, une initiative caritative, une création artistique, des étudiants ou des entrepreneurs peuvent à présent se financer, par des dons, des prêts, ou des investissements de particuliers enthousiasmés par leur projet. C’est le crowdfunding ou le crowdlending, aujourd’hui porté par des projets comme Kiva, Kickstarter, Ulule, LendingClub, KissKissBankBank, ou encore Prodigy Finance. Les contributeurs se sentent parties prenantes d’un projet qui les touche, ont l’opportunité d’avoir un impact, ils partagent de l’argent mais aussi de l’émotion, en donnant un sens à leur investissement.

Partage de temps

Chacun peut proposer de son temps et savoir-faire, que ce soit pour des coups de pouce de voisinage, ou comme activité indépendante, sur des sites comme TaskRabbit, Hopwork ou Star of Service. On partage plus librement son temps et ses compétences quel que soit son âge ou son curriculum vitae.

Partage de contenu

Les dossiers, la musique, les films, sont à présent dans le « cloud » et partagés grâce à un accès dématérialisé en tous lieux et tout temps (Dropbox, Spotify, Deezer, Netflix). Le partage de contenu a d’ailleurs initialement été l’un des tous premiers partages à voir le jour via les plateformes, en commençant par des services comme Napster dès 1999.

L’économie du partage est une conséquence logique des innovations de rupture de ce début de siècle qui permettent à l’individu de démultiplier son réseau afin de bénéficier d’un accès facilité et personnalisé à la solution recherchée. Mais l’engouement des utilisateurs résulte aussi, et peut-être surtout, des effets vertueux du partage.

L’économie de partage

L’économie de partage crée de nouvelles interactions entre individus d’horizons socio-professionnels, culturels ou générationnels différents

L’économie de partage crée un effet de nouvelles interactions entre individus d’horizons socio-professionnels, culturels ou générationels différentsqui n’auraient jamais eu l’occasion de se rencontrer et qui choisissent de partager une expérience.

La perception de « l’autre », de « l’étranger », « de l’inconnu » change, le cercle de la confiance s’élargit et génère de nouveaux échanges enrichissants.

Par ailleurs, l’optimisation des ressources inhérente au partage d’actifs sous-utilisés est d’une logique imparable face aux conséquences de nos modes de consommation qui ont mis en exergue nos limites environnementales. Le gâchis n’est plus de mise.

Le partage permet également une augmentation du pouvoir d’achat des particuliers qui peuvent monétiser leurs actifs sous-utilisés (temps, talents, ou biens) là ou aucune demande n’existait précédemment, et ce à coût marginal quasi-nul, créant ainsi une offre de biens ou services à coûts bas pour leurs paires. Comme l’explique Jeremy Rifkin, auteur de La Troisième Révolution Industrielle, et de La Nouvelle Société du coût marginal zéro: « Nous n’avions jamais anticipé la possibilité d’une révolution technologique tellement extrême qu’elle pourrait réduire ce coût marginal, pour un ensemble important de biens et de services, à presque zéro, rendant ces biens et services virtuellement gratuits et abondants. »

Tous ces avantages ont un réel impact sur la vie des utilisateurs. Prenez Thierry par exemple, membre BlaBlaCar, qui grâce à l’accessibilité du covoiturage peut voir sa fille plus souvent alors qu’il exerce sa profession d’architecte à 250km de chez lui, ou Mariem, étudiante que BlaBlaCar rapproche de son fiancé qui vit à 300km d’elle.

Nous sommes tous invités à partager, optimiser, et découvrir « l’autre » sous un autre jour. Dans un monde que l’on craint parfois trop individualiste, où le pouvoir d’achat est mis à mal, et ou l’on cherche des solutions pour réduire notre impact environnemental, ces nouveaux modèles offrent une alternative prometteuse.

La rupture positive de l’économie du partage est en marche !

 

source / http://regards-citoyens-europe.over-blog.com/2016/01/l-ineluctable-ascension-de-l-economie-du-partage-par-frederic-mazzella-president-fondateur-de-blablacar.html