Comment la dénaturalisation a révolutionné la citoyenneté américaine
Historien et politologue
Historien, directeur de recherche au CNRS, au Centre d’histoire sociale du XXe siècle de l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne. Il enseigne régulièrement à l’École d’Économie de Paris et à la Yale Law School. Ses derniers ouvrages parus sont, en 2010, Liberté, Égalité, Discriminations, l’identité nationale au regard de l’histoire, Folio / Gallimard, en 2011, Être français. Les quatre piliers de la nationalité, éd. de l’Aube, et, en 2013, The Sovereign Citizen. Denaturalization and the Origins of
Instaurée par les États-Unis au début du XXe siècle, la dénaturalisation a d’abord servi à faire de la naturalisation une prérogative fédérale quand auparavant des juges d’États (fédérés) en décidaient. Mais elle est aussi devenue une arme, durcie lors des deux Guerres mondiales, contre des naturalisés perçus comme « un American » pour leur engagement politique ou leur allégeance étrangère. En affirmant en 1967 la souveraineté du citoyen, la Cour suprême, longtemps divisée sur la question, a rendu la nationalité américaine inaliénable et révolutionné le traditionnel lien entre État et national.
Les déchéances de nationalité et les dénaturalisations sont le plus souvent associées, au XXe siècle, aux régimes autoritaires – l’Union soviétique, l’Allemagne nazie, le régime de Vichy. On sait moins que les grandes démocraties, France, États-Unis, Royaume-Uni…, ont elles aussi mis en place des politiques de dénaturalisation.
En France, lorsque la Première Guerre mondiale éclate, le droit affiché pour les Allemands naturalisés à l’étranger de conserver leur nationalité française provoque de très vives réactions. En réponse, la loi du 7 avril 1915 prévoit que le naturalisé d’origine ennemie qui a porté les armes contre la France, a quitté le territoire français pour se soustraire à une obligation militaire ou a « conservé la nationalité de son pays d’origine » puisse être déchu de la nationalité française – après avis du Conseil d’État. Cette loi de 1915 ne dure que deux ans. L’administration ayant des difficultés à apporter des preuves tangibles du maintien dans la nationalité d’origine exigées par le Conseil d’État, le parlement adopte une nouvelle loi, promulguée le 18 juin 1917, qui précise « les circonstances de nature à faire présumer que le naturalisé a conservé sa nationalité d’origine et attribue aux tribunaux civils le pouvoir de déchoir ».
En Grande-Bretagne, un Act du 8 août 1918 inscrit de façon permanente dans la législation le retrait de naturalisation dans toute une série de cas : défaut de résidence (plus de sept ans) dans l’Empire britannique ; manque de loyalisme envers le souverain ou connivence avec l’ennemi durant une guerre ; mais aussi condamnations pénales, etc. Au Royaume-Uni comme en France, les politiques de dénaturalisations issues de la guerre sont conservées dans la législation des temps de paix. En France, la loi de 1927 inscrit de façon permanente dans la législation la déchéance possible des naturalisés qui avait été prévue en 1915 et 1917 par des lois temporaires pour temps de guerre.
Aux États-Unis, depuis 1906, la loi permet au gouvernement fédéral de demander à un juge l’annulation d’une naturalisation si celle-ci a été obtenue par fraude ou illégalement. Cette dénaturalisation instaurée en tant de paix avait comme principal objectif pour le pouvoir fédéral de réduire, voire de supprimer, les illégalités et la corruption qui, en ce début du XXe siècle, régnaient dans l’octroi des naturalisations par des juges locaux, soit dans chaque État, et non pas comme aujourd’hui par l’administration fédérale. Très vite, cependant, la dénaturalisation deviendra une arme utilisée contre des naturalisés perçus comme radicaux ou « un American », notamment pendant la Première puis la Seconde Guerre mondiale. À partir de là, une bataille va se dérouler pendant trente ans à la Cour suprême. En 1967, finalement, la Cour déclare qu’aux États-Unis, ce sont les citoyens qui sont souverains et non pas l’État – et qu’ils ne peuvent donc être déchus de leur nationalité. Le débat sur la dénaturalisation aux États-Unis, un phénomène relativement mineur (avec 22 026 décisions de dénaturalisation entre 1907 et 1967 au regard de 8 517 662 naturalisations au cours de la même période), aura ainsi provoqué la redéfinition de la nationalité américaine. Cet article est une courte présentation de ma recherche, la première sur le sujet (Weil, 2013).
À l’origine, obliger les tribunaux à respecter la loi
Au départ, après le vote de la loi de 1906, la dénaturalisation est appliquée à la lettre à tous ceux qui avaient été naturalisés sans avoir respecté l’ensemble des procédures et obligations prévues par la loi. Mais leur nombre est si important, probablement entre un tiers et la moitié des naturalisés américains, que George Wickersham, le ministre de la Justice du président Taft (1909-1913), va ordonner de n’entamer de procédure de dénaturalisation que si celle-ci peut se faire au bénéfice du corps politique américain [1][1] Instructions as to Naturalization Matters, Department…. L’application de la loi fait donc l’objet d’une auto-restriction par le gouvernement. En conséquence, la procédure de dénaturalisation va d’abord servir au combat pour l’assainissement des tribunaux. Lorsqu’on y trouve de la corruption, ou lorsque la procédure de naturalisation prévue par la loi fédérale n’a pas été respectée dans tous ses détails, on dénaturalise. Mais il ne s’agit pas de punir les individus, perçus ici comme des victimes, et souvent, après leur dénaturalisation, ceux-ci sont renaturalisés dans la foulée, cette fois en suivant la procédure. L’objectif du Bureau de la naturalisation, créé au sein du ministère du Travail et du Commerce par la loi de 1906, est la standardisation, la nationalisation et finalement la conquête par l’Administration fédérale du pouvoir de naturaliser, toujours en vigueur. Comme ce Bureau le reconnaît lui-même, la dénaturalisation est très vite devenue le principal instrument de cette lente et progressive appropriation et aujourd’hui, c’est auprès d’une administration fédérale, le département du Homeland Security, que celle-ci se décide, les juges (seulement fédéraux) n’ayant plus qu’une fonction cérémoniale. Cette conquête a été le produit de batailles entre ministères, avec les juges et entre eux. Le Congrès a soutenu le nouveau Bureau de la naturalisation en lui accordant des crédits budgétaires de plus en plus importants et progressivement les juges, submergés par les tâches que leur imposait la loi et craignant la « punition » de la dénaturalisation, ont volontairement accepté, voire proposé de lâcher leur pouvoir.
Les dénaturalisations politiques
Mais le rôle de la procédure de dénaturalisation ne s’est pas arrêté là. L’une des dispositions de la loi de 1906 prévoyait qu’au-delà de la fraude ou de l’illégalité commise pendant la procédure de naturalisation ou avant, toute personne naturalisée qui allait résider dans son pays d’origine dans les cinq ans suivant la naturalisation perdait sa nationalité américaine. En 1907, cette disposition est renforcée dans une loi sur l’expatriation qui vise tous les Américains ayant un comportement « unAmerican ». L’objectif de cette loi est de « nettoyer le corps politique de ses éléments ‘indésirables’’ » à une période où l’immigration atteint une ampleur sans précédent aux États-Unis, l’année 1907 constituant l’année record avec 1 285 349 entrées (Wurtz, 1925). Le temps est donc au restrictionnisme et, le 20 février 1907, le Congrès adopte un premier train de mesures (hausse de la taxe d’entrée de 2 à 4 $, exclusion des mineurs non accompagnés, des personnes atteintes d’infériorité physique ou mentale et des prostituées) tout en confiant à une commission de l’Immigration, la commission Dillingham (du nom du sénateur qui la préside) le soin d’en élaborer d’autres. Le rapport de cette commission, remis en 1911, jouera un rôle décisif dans la mise en place de la limitation numérique et de la sélection ethnique des immigrants qui seront adoptées en 1921 et accentuées en 1924 (Fuchs, 1983).
La loi du 2 mars 1907 sur l’expatriation, votée quelques jours plus tard, semble donc répondre à l’objectif de « réduire le nombre d’Américains, qui aux yeux du gouvernement fédéral, ont compromis leur statut de citoyens en maintenant ou en établissant des liaisons étrangères d’un certain type » [2][2] Carrie Chapman, future présidente de la National American… (Bredbenner, 1998, p. 48). Sont visés, à nouveau, les naturalisés partis vivre à l’étranger : la limite des cinq années après la naturalisation saute et, si le naturalisé va habiter dans un tiers pays étranger (un Américain d’origine allemande allant habiter au Canada par exemple), il se voit aussi retirer – automatiquement – sa nationalité américaine. La dénaturalisation de ces indésirables vise aussi les Asiatiques, parfois naturalisés illégalement par des juges locaux, et, surtout, des politiques, des anarchistes puis des socialistes, des communistes et enfin des fascistes ou des nazis. La première dénaturalisation politique est celle qui frappe en 1909 Emma Goldman. Le prétexte trouvé par l’Administration est que son mari, juif russe naturalisé américain, par lequel elle était devenue américaine au moment de son mariage, et dont elle avait divorcé un an après, avait menti au moment de sa propre naturalisation vingt ans auparavant sur son âge et sa date d’arrivée aux États-Unis. Il est donc dénaturalisé et Emma Goldman par voie de conséquence également. Elle sera expulsée dix ans plus tard, en 1919, vers l’Union soviétique [3][3] C’est Edgar J. Hoover, futur directeur du FBI, qui… (Cole, 2003, p. 119).
Toutefois, ce recours à l’argument du non- respect d’une des nombreuses dispositions explicites de la loi sur la naturalisation (âge, durée de séjour, respect des procédures devant le juge, etc.) s’avère insuffisant pour permettre de dénaturaliser les naturalisés aux options politiques jugées radicales. C’est pourquoi les juges créent et utilisent le concept de « réserve mentale » (« mental reservation ») au moment du serment d’allégeance aux États-Unis que doit prononcer tout naturalisé, selon le raisonnement suivant : si, pendant la Première Guerre mondiale, un naturalisé d’origine allemande s’exprime contre la guerre et que vingt-cinq ans se sont écoulés depuis sa naturalisation, au cours desquels son intégration est censée avoir progressé avec le temps, c’est qu’au moment du serment d’allégeance il a menti et fait preuve de « réserve mentale ». Sur ces bases, une dizaine d’Américains d’origine allemande sont dénaturalisés au cours ou juste après la Première Guerre mondiale. Sur ces bases, des naturalisés soupçonnés d’être anarchistes ou communistes sont dénaturalisés dans l’entre-deux-guerres. Surtout, sur ces bases, le gouvernement américain lance, après l’attaque de Pearl Harbor en 1941 et l’entrée des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale, une politique systématique de dénaturalisation des Américains d’origine allemande soupçonnés d’être pro-nazis. Initié par Francis Biddle, ministre de la Justice de Franklin Roosevelt pendant la guerre, et animé par Edgar Hoover, directeur du FBI, ce programme va mobiliser tout l’appareil du ministère de la Justice américain à partir de mars 1942. Il conduira à des enquêtes sur des milliers de citoyens. Lorsque la procédure aboutit et que la personne est dénaturalisée, son internement comme « enemy alien » peut alors intervenir immédiatement.
La Cour suprême intervient et redéfinit la nationalité américaine
Ce programme voit sa portée drastiquement limitée par une première décision (en 1943 avec l’arrêt Schneiderman) [4][4] Schneiderman v. United States, 320 US 118 (1943). de la Cour suprême en faveur d’un communiste dénaturalisé, puis une autre (en 1944 avec l’arrêt Baumgartner) [5][5] Baumgartner v. United States, 322 US 665 (1944). au bénéfice d’un nazi. La Cour établit le droit d’un naturalisé de pratiquer librement des activités politiques même extrêmes après sa naturalisation et établit pour la dénaturalisation des conditions drastiques : le gouvernement devra dorénavant fournir des preuves claires, sans équivoque et convaincantes, d’éventuelles illégalités ou fraudes commises pendant ou avant la procédure de naturalisation, s’il veut obtenir d’un juge une décision de dénaturalisation. Cette nouvelle jurisprudence de la Cour suprême ne règle pas cependant le cas des naturalisés partis ensuite vivre à l’étranger. En fait, au départ et au moins jusqu’en 1926, cette catégorie d’Américains est peu visée par la dénaturalisation, toujours du fait de l’intervention, dès le passage de la loi en 1907, du ministre de la Justice George Wickersham : celui-ci avait décidé d’interpréter cette disposition de la loi comme ne supprimant pas la nationalité de ces naturalisés résidant à l’étranger mais suspendant seulement la protection que les États-Unis doivent, comme tout État, à leurs ressortissants à l’étranger [6][6] Ce qui signifie que s’ils reviennent vivre aux États-Unis,…. À partir de 1926, un compromis passé entre le State Department et le ministère de la Justice permet au gouvernement de s’attaquer à ceux de ces naturalisés américains qui se sont expatriés dans leur pays d’origine au cours des cinq ans suivant leur naturalisation. À compter de 1940, cependant, la législation est durcie. Ce sont l’ensemble des naturalisés résidant à l’étranger – quel que soit le temps écoulé depuis leur naturalisation, quel que soit le pays où ils résident – qui sont passibles de la dénaturalisation automatique sans passage devant un juge. Également, à partir de 1940, de nombreux Américains nés Américains : ceux qui échapperaient à la conscription, qui voteraient dans une élection à l’étranger, qui rejoindraient une armée étrangère, sont tout à coup passibles de la déchéance de nationalité. Le sort des naturalisés expatriés va se jouer en même temps que celui de ces Américains nés Américains qui, à partir de 1955 et jusqu’en 1971, va profondément diviser la Cour suprême.
Une bataille méconnue, qui n’a curieusement jamais fait l’objet de travaux historiques aux États-Unis, dont a dépendu le sort de la citoyenneté américaine, est alors livrée. D’un côté, le Chief Justice Warren, Hugo Black et William Douglas considèrent la déchéance de nationalité est inconstitutionnelle et, de l’autre, Felix Frankfurter, Tom Clark ou John Marshall Harlan soutiennent que la loi et la jurisprudence peuvent permettre, dans certains cas, cette déchéance. Au départ, Earl Warren est minoritaire. Il ne l’emporte dans un premier cas en 1958 (arrêt Trop) [7][7] Trop v. Dulles, 356 US 86 (1958). que parce que la déchéance a entraîné l’apatridie, laquelle est déclarée contraire au 8e amendement qui interdit les punitions cruelles et inhabituelles. Le même jour est déchu de sa nationalité américaine un Mexicain-Américain, pour avoir voté aux élections mexicaines (arrêt Perez) [8][8] Perez v. Brownell, 356 US 44 (1958).. En 1962, après quatre années de bataille et de votes contradictoires, c’est une nouvelle victoire pour Warren sur deux cas de non-respect des obligations militaires en temps de guerre (arrêt Mendoza-Martinez et arrêt Cort, 1962) [9][9] Rusk v. Cort, 369 US 367 (1962) et Kennedy v. Mendoza-Martinez…. En 1964, l’arrêt Schneider [10][10] Schneider v. Rusk, 377 US. 163 (1964). vient consacrer le droit des naturalisés de résider à l’étranger au nom du 5e amendement (principe de non-discrimination). Mais, le même jour que l’arrêt Schneider, la Cour accepte de provoquer l’apatridie d’un Américain ayant rejoint les troupes de Fidel Castro à Cuba (arrêt Marks 1964) [11][11] Marks v. Esperdy, 377 US. 214 (per curiam) (1964). Ces décisions contradictoires forcent l’aile progressiste de la Cour à reprendre le combat avec une nouvelle justification, plus forte, à même de protéger tous les Américains de la déchéance de nationalité. Dans un arrêt de 1967, Afroyim contre Rusk [12][12] Afroyim v. Rusk, 387 US. 253 (1967)., la Cour décide de garantir de façon absolue la sécurité juridique de toute personne née ou naturalisée aux États-Unis, ces Américains que définit et finalement protège le 14e amendement à la Constitution américaine. Pour ce faire, l’arrêt Afroyim reprend, en la renforçant encore, la définition de la nationalité que Warren avait développée en 1958 dans une opinion dissidente dans l’arrêt Perez où il était minoritaire. Définir la nationalité comme le droit d’avoir des droits, comme le suggérait Hannah Arendt, pouvait justifier le refus de provoquer l’apatridie, mais ne pouvait permettre de protéger de la déchéance le double national. Car si un Mexicain-Américain était déchu de la nationalité américaine, il conservait la nationalité et le droit d’avoir des droits au Mexique.
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Une protection absolue du citoyen
Le concept de « souveraineté du citoyen » va permettre à Warren de procéder à cette protection. Se fondant sur l’origine de la république américaine – l’État américain a été créé par ses citoyens et non l’inverse –, et sur une lecture littérale du 14e amendement, la Cour suprême américaine renverse la traditionnelle dépendance de l’individu à l’État. Elle indique que chaque citoyen détient une part de la souveraineté nationale qui ne saurait être remise en cause par un pouvoir exécutif par définition temporairement aux affaires. Aiguillonnée par la créativité de Hugo Black (probablement l’inventeur de ce concept de souveraineté du citoyen (Weil, 2013, p. 152-55), la Cour Warren a révolutionné la définition de la citoyenneté américaine. Le citoyen américain est dorénavant souverain, sa souveraineté est inaliénable et son statut inconditionnellement protégé. Négligée, voire méprisée par la doctrine américaine, cette redéfinition a peut-être pourtant ouvert la voie à une nouvelle approche de la souveraineté et du rapport entre citoyens et États partout dans le monde.
Bibliographie
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Bredbenner C. L., 1998, A Nationality of Her Own. Women, Marriage, and the Law of Citizenship, Berkeley et Los Angeles, University of California Press.
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Cole D., 2003, Enemy Aliens : Double Standards and Constitutional Freedoms in the War on Terrorism, New York, New Press.
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Fuchs L. H., 1983, « Immigration Reform in 1911 and 1981 : The Role of Select Commissions », Journal of American Ethnic History, automne, p. 58-89.
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Weil P., 2013, The Sovereign Citizen. Denaturalization and the Origins of the American Republic, Philadelphie, University of Pennsylvania Press.
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Wurtz P., 1925, La question de l’immigration aux États-Unis, Paris, éd. L. Dreux & M. Schneider.
Notes
Instructions as to Naturalization Matters, Department of Justice, Department Circular Letter n° 107, Archives fédérales américaines, RG 60, General Records of the Department of Justice, Administrative Orders, Circulars, and Memoranda, 1856–1953, Unnumbered files (1856–1903) ; 1–250 (1907–1911). Voir Weil, 2013, p. 28.
Carrie Chapman, future présidente de la National American Woman Suffrage Association (NAWSA), n’hésite pas à proposer d’échanger le droit des hommes naturalisés ou vivant dans les ghettos des villes, menaces pour l’Amérique, contre celui des femmes.
C’est Edgar J. Hoover, futur directeur du FBI, qui organise son expulsion ainsi que celle de 248 étrangers, anarchistes ou syndicalistes.
Schneiderman v. United States, 320 US 118 (1943).
Baumgartner v. United States, 322 US 665 (1944).
Ce qui signifie que s’ils reviennent vivre aux États-Unis, ils sont toujours pleinement Américains.
Trop v. Dulles, 356 US 86 (1958).
Perez v. Brownell, 356 US 44 (1958).
Rusk v. Cort, 369 US 367 (1962) et Kennedy v. Mendoza-Martinez – 372 US 144 (1963).
Schneider v. Rusk, 377 US. 163 (1964).
Marks v. Esperdy, 377 US. 214 (per curiam) (1964)
Afroyim v. Rusk, 387 US. 253 (1967).
Résumé
Français
Instaurée par les États-Unis au début du XXe siècle, la dénaturalisation a d’abord servi à faire de la naturalisation une prérogative fédérale quand auparavant des juges d’États (fédérés) en décidaient. Mais elle est aussi devenue une arme, renforcée dans le contexte des deux Guerres mondiales, contre des naturalisés perçus comme « unAmerican » pour leur engagement politique ou leur allégeance étrangère. Un citoyen naturalisé peut être déchu de la nationalité au motif des « réserves mentales », qui tend à punir le mensonge lors du serment d’allégeance. En affirmant en 1967 la souveraineté du citoyen, la Cour suprême, longtemps divisée sur la question, a rendu la nationalité américaine inaliénable et révolutionné le traditionnel lien entre État et national, intégrant ainsi le principe de refus de créer des apatrides.
Plan de l’article
Pour citer cet article
Weil Patrick, « « Le Citoyen est Souverain, pas l’État ». Comment la dénaturalisation a révolutionné la citoyenneté américaine», Informations sociales 3/2013 (n° 177) , p. 68-74
URL : www.cairn.info/revue-informations-sociales-2013-3-page-68.htm.